Infection nosocomiale

Par Catherine Dupeyron

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Infection nosocomiale

par Catherine Dupeyron

Biologiste, hôpital Albert-Chenevier, Créteil, France.

Nosocomial, risque nosocomial, infection nosocomiale... Un mot récent, un mot trop souvent prononcé, un mot dérivé d'un mot grec " nosocomia " qui signifie " soin que l'on donne à un malade ". Une infection nosocomiale est une infection contractée par un patient au cours d'un séjour hospitalier ou plus simplement lors de soins ou d'examens réalisés à l'hôpital ou en milieu médical.

Mais comment se fait-il qu'on parle encore d'infection hospitalière à notre époque, malgré les connaissances et les moyens dont nous disposons ?

L'infection hospitalière a été le problème de tous les temps. Grâce aux grands travaux de la fin du siècle dernier sur la découverte des microbes, sur l'asepsie et l'antisepsie, les risques des séjours hospitaliers ont diminué : la gangrène, le tétanos, les infections puerpérales, les grandes épidémies de typhus ou de choléra contractées à l'hôpital, qui décimaient des patients, qui sans cela auraient guéri même avec les moyens de l'époque, ont heureusement pratiquement disparu.

Cependant l'infection hospitalière est toujours présente et constitue à nouveau un problème majeur de santé publique. Elle a changé de visage, elle est plus sournoise et les causes en sont multiples :

  • La première et non la moindre est la dégradation et l'oubli des pratiques de l'hygiène. Ceci s'explique en partie par l'impression de sécurité qu'a donné l'apparition des antibiotiques, ces médicaments " miracle " des années 40, susceptibles de prévenir ou de résoudre tous les problèmes infectieux. Leur utilisation trop fréquente et mal contrôlée ainsi que les grandes capacités d'adaptation des bactéries ont abouti à la sélection de germes très résistants chez l'homme et dans l'environnement hospitalier, agents potentiels d'infection, dont il est encore plus difficile de se débarrasser.

  • Les progrès de la médecine et de la chirurgie sont également responsables de la situation. Ils permettent de soigner et de maintenir en vie des patients de plus en plus fragiles du fait de leur âge où de la diminution de leurs défenses et donc beaucoup plus sensibles aux infections. Les thérapeutiques et les soins de plus en plus agressifs sont aussi des sources possibles d'infection.

Les épidémies n'ont pas disparu mais sont plus difficiles à détecter car elles sont dues à des germes banals, le plus souvent présents dans la flore digestive, oropharyngée ou cutanée des malades ou des soignants. Ainsi les staphylocoques dorés, les colibacilles ou les entérocoques font partie de la flore habituelle de la peau ou du tube digestif. Ces bactéries provoquent des infections si elles pénètrent dans l'organisme au niveau des plaies, ou par l'intermédiaire d'un corps étranger. Le malade peut alors être victime d'abcès, d'infections urinaires ou respiratoires ou même de septicémies.

N'oublions pas la tuberculose, très contagieuse, nécessitant l'isolement, toujours très présente dans les pays en développement.

À cela, il ne faut pas oublier d'ajouter tous les risques infectieux liés aux expositions au sang : hépatites B et C, VIH. Ils sont dus à l'injection de dérivés sanguins mal préparés et à la réutilisation de matériel médical mal stérilisé (aiguilles, seringues, scalpels, etc.).

Tous ces facteurs doivent nous rendre encore plus vigilants. Si autrefois ces infections provenaient d'une méconnaissance complète des mesures d'hygiène et d'une transmission d'un malade à l'autre en particulier par les mains des soignants dans un contexte de surpopulation de malades, le fond du problème reste actuellement le même. Nous devons nous sentir tous concernés par la prévention, l'amélioration des pratiques de l'hygiène de base et le contrôle des bonnes conditions de stérilisation. Notre premier devoir est d'éviter toute infection évitable.

Il a été montré récemment que la cause majeure de la transmission des bactéries était le manque d'hygiène et l'absence de lavage des mains. Avec peu de moyens nous pouvons et devons améliorer cette pratique. Ceci ne concerne pas seulement les soignants mais relève de la responsabilité de tout le personnel médical, paramédical, administratif et chargé de l'entretien.

La lutte contre l'infection nosocomiale est indissociable du développement et du respect de l'hygiène de base. Elle doit être le problème de chacun.

Développement et Santé, n° 139, février 1999