Sérodiscordance et désir d'enfant
Evaluation du désir d’enfant chez les couples sérodiscordants en Afrique.
Qu’est-ce qu’un couple discordant ?
Dans les couples discordants, un des partenaires est séropositif et l’autre séronégatif. Ces couples sont de plus en plus nombreux dans les pays africains.
Prévalence chez les couples discordants
En Afrique subsaharienne, la prévalence des couples discordants se chiffre entre 3 et 20 % de la population générale. Ce chiffre passe à 20-35 % dans les couples dont l’un des partenaires est soigné par ARV.
Risque de transmission en cas de sérodiscordance entre les partenaires
Les personnes séronégatives pour le VIH, qui ont des partenaires discordants, risquent d’être infectées. En 2007, une étude a montré qu’à l’échelle mondiale, plus de 50 % des nouvelles infections au VIH se manifestent chez les couples sérodiscordants.
Même dans des milieux où la prévalence est faible, tels que le Canada et les États-Unis, la transmission chez les couples discordants demeure une préoccupation. Une modélisation, en 2004, incluant 3723 hommes et femmes américains atteints du VIH, indiquait qu’on pouvait s’attendre à plus de 30 nouvelles infections chez leurs partenaires discordants dans un délai de 3 mois.
L’article décrit l’influence du VIH sur les relations sexuelles et la décision d’avoir ou non un enfant chez 36 couples sérodiscordants.
Questionnaires auto-administrés donnés à 36 couples sérodiscordants
Parmi les couples étudiés, 26 étaient originaires d’Afrique du Sud ; 10 de Tanzanie.
Le recrutement s’est fait dans des centres de traitement ARV. La majorité des partenaires séropositifs étaient des femmes qui suivaient un traitement ARV.
Ces questionnaires auto-administrés ont permis d’obtenir des informations démographiques.
Ils ont été complétés par des entretiens approfondis, individuels et en couple, afin d’explorer les relations sexuelles et les décisions sur la paternité/maternité.
Principaux résultats
La sérodiscordance modifie l’équilibre du couple :
- en créant des tensions au sein du couple, décrites par près d’un tiers des répondants sud-africains et la moitié des répondants tanzaniens ;
- en affectant l’intimité du couple, pour plus de la moitié des Sud-Africains et près des trois quarts des Tanzaniens.
Les tensions dans le couple étaient dues :
- à la peur de transmettre l’infection à leur partenaire séronégatif ;
- à la crainte, fondée ou non, d’infidélité de leur partenaire ;
- à l’utilisation du préservatif (perte de spontanéité, diminution de la libido, moindre fréquence des rapports sexuels, conflit entre le désir d’enfant et le souci de protéger son partenaire, peur d’infecter le partenaire malgré tout).
Le désir d’avoir un enfant :
- est fréquent : 17 couples sur les 32 qui n’étaient pas parents, et 16 sur les 44 qui avaient déjà des enfants ;
- est perturbé par la crainte de la transmission du VIH au partenaire séronégatif.
De nombreux couples déclarent vouloir les conseils d’un professionnel de santé avant de concevoir un enfant.
Pour beaucoup, la procréation médicalement assistée ne représente pas une méthode alternative souhaitée, ou elle reste trop onéreuse.
Conclusion : nécessité d’une information ciblée pour les couples
La plupart des interventions de prévention, traitement, soins et soutien du VIH sont destinées aux individus et il existe peu d’interventions pour les couples.
Des services de conseil et de soutien aux couples paraissent indispensables.
Les couples sérodiscordants devraient bénéficier de services de santé sexuelle et reproductive dans un cadre favorable et non discriminatoire et devraient être impliqués dans la riposte au VIH
Références de l’article : L C Rispel, C A Metcalf, K Moody, A Cloete, G Caswell ; “ Sexual relations and childbearing decisions of HIV-discordant couples : an exploratory study in South Africa and Tanzania ” ; Reproductive Health Matters, Volume 19, Issue 37, May 2011, 184-193