Encéphalite à litchis

Par Philippe Reinert, pédiatre, Créteil

Publié le

Le mystère de l'encéphalite des enfants mangeurs de litchis résolu...

Depuis les années 1990, dans le nord de l’Inde (province du Bihar, ville de Muzzaffarpur) chaque année une épidémie d’encéphalites touchait des centaines d’enfants, entraînant une mortalité de près de 40%.
Des faits analogues sont survenus au Vietnam.
Les enquêtes menées depuis plus de 15 ans ont retrouvé des liens troublants :

  • Ces épidémies surviennent entre mai et juin à l’époque où s’effectue la récolte des litchis.
  • Tous les enfants s’étaient gavés de litchis la veille du drame.
  • Ils n’avaient pas dîné le soir.
  • Enfin, ils étaient souvent malnutris.

Quant au tableau clinique, les parents trouvaient le matin leur enfant comateux, ayant quelquefois des mouvements convulsifs et ayant parfois vomi la nuit.
Les recherches ont porté sur l’isolement d’un nouveau virus ou d’une intoxication par pesticides, sans succès.
Quant à la biologie, on eut la surprise de mettre en évidence, dans presque tous les cas, une hypoglycémie profonde, ce qui n’est pas habituel dans les encéphalites virales.
Il s’agit donc d’une encéphalopathie par hypoglycémie, et non d’une encéphalite, terme réservé aux infections virales.

On découvrit dans les urines des enfants une substance hypoglycémiante, l’hypoglycine A, présente dans certains fruits trop verts comme dans les litchis pas mûrs. Cette substance est également présente dans d’autres fruits comme les akiou, daki ou kaha (Blighia sapida), qui sont responsables de vomissements avec encéphalite (encéphalopathie de la Jamaïque). De tels accidents ont été rapportés en Côte d’Ivoire, au Togo et au Burkina Faso.

Tout n’est pas résolu : existe-t-il une susceptibilité génétique à l’hypoglycine A, quel rôle joue la dénutrition ? Car tous les enfants mangeurs de litchis ne sont pas atteints.
Depuis cette découverte, il est fermement conseillé d’interdire la consommation de fruits verts et, dès l’arrivée de l’enfant au centre de santé, d’installer une perfusion de sérum glucosé qui, en peu de temps, guérit l’enfant.

Conclusion
Devant tout coma, la mesure de la glycémie est fondamentale.
Le coma hypoglycémique peut entraîner des lésions cérébrales irréversibles : c’est une urgence vitale.
On voit l’intérêt d’une étude épidémiologique rigoureuse dans de telles situations.

Lancet : 30 Janvier 2017, PS Spencer, V Palmer