Prise en charge de la douleur chez les patients VIH +

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Selon le rapport 2004 de l'ONUSIDA relatif à l'épidémie de SIDA, plus de 50 % des personnes HIV+ souffriraient de douleurs au cours de la maladie.

Les douleurs peuvent être en lien avec les pathologies opportunistes, ou en lien avec le VIH lui-même.

La gestion de la douleur constitue une priorité dans la prise en charge globale d'un patient VIH+. Du fait de son caractère subjectif la douleur est parfois difficile à évaluer, en effet, elle est un signe clinique que l'infirmier ne peut pas voir. C'est pourquoi, dans le but d'objectiver la douleur, il est nécessaire pour l'infirmier de posséder des outils d'évaluation standardisés.

L'infirmier doit évaluer la douleur pour proposer une réponse thérapeutique adaptée au malade.

I. Evaluation de la douleur

Evaluer = mesurer

L'évaluation est un élément clef dans la bonne gestion de la douleur. En effet, de la qualité de l'évaluation dépend la qualité du traitement. L'infirmier peut utiliser des moyens simples pour évaluer le seuil de douleur des patients, par exemple avec l'échelle verbale simple (EVS). L'infirmier demande au patient de quantifier sa douleur en employant des mots précis.

Cette échelle est cotée de 0 à 3.

0 = pas de douleur NON

1 = douleur modérée UN PEU

2 = douleur importante BEAUCOUP

3 = douleur très intense ENORMEMENT

L'infirmier peut également utiliser les doigts de sa main en les montrant au patient :

0 doigt = pas de douleur ;

1 doigt = douleur légère ;

2 doigts = douleur moyenne...

jusqu'à 5 doigts où la douleur est maximale. Pour une bonne évaluation, l'infirmier doit faire décrire par la patient le siège et le type de la douleur.

Il existe plusieurs types de douleurs. Le patient VIH + peut souffrir de douleurs aiguës et/ou de douleurs chroniques.

II. Les antalgiques

Les médicaments antalgiques pour lutter contre la douleur sont différents. Ils n'ont pas tous la même force et doivent être administrés selon le type de douleur et son intensité. En effet, on ne peut pas donner à un patient qui souffre beaucoup le même traitement qu'a un patient qui souffre un peu.

a) Niveau I : antalgiques non morphiniques

douleurs faibles et modérées

  • Acide acétyl salicylique (AAS) et AINS
  • Paracétamol

b) Niveau II : agonistes morphiniques faibles

douleurs modérées à intenses

  • Dextropropoxyphéne
  • Codéine
  • Tramadol

c) Niveau III : agonistes morphiniques

douleurs très intenses

  • Morphiniques.

Exemple d'échelle utilisant les visages (échelle UPSA)

Pour les douleurs peu intenses : antalgique de niveau I

**AAS** : 2 a 3 g maximum par 24 h

Surveillance infirmière :

L'AAS (aspirine) peut faire saigner le patient. L'infirmier doit surveiller si des saignements apparaissent :

  • dans la bouche (notamment au niveau des gencives) ;
  • au niveau du nez ;
  • dans les selles.

A ne pas utiliser si suspicion de dengue (risques hémorragiques),

Paracétamol : 3 g maximum par 24 h

Pour les douleurs modérées : antalgiques de niveau II

  • dextropropoxyphéne : 1 à 2 comprimés par prise à 8 heures d'intervalle
  • dextropropoxyphéne et paracétamol : jusqu'à 6 gélules (400 mg) par jours en 3 à 4 prises
  • codéine et paracétamol : 30 mg de codéine et 500 mg de paracétamol par comprimé ; 2 à 6 comprimés par jour en 3 à 4 prises.

Surveillance infirmière :

Nausées, vomissements, constipation...

Pour les douleurs intenses

Morphine

  • chlorhydrate de morphine : prise toutes les 4 heures, début à 5 mg par prise et augmenter progressivement de 5 mg en 5 mg jusqu'à ce que le patient soit calmé.
  • sulfate de morphine : prise toutes les 12 heures augmentation des doses progressives de 10 mg en 10 mg.

Surveillance infirmière :

La prise de morphine peut entraîner au bout de quelques jours de traitement des nausées et vomissements qui peuvent être calmés par des neuroleptiques faibles tels que le métoclopramide.

Si une dose de morphine trop élevée est administrée une insuffisance respiratoire peut apparaître.

L'infirmier surveille :

  • la fréquence respiratoire (amplitude, régularité) ;
  • le pouls (en cas de détresse respiratoire le pouls est augmenté = tachycardie) ;
  • la tension artérielle (hypotension).

Si le patient éprouve des difficultés respiratoires = réduire les doses de morphine

La morphine peut être administrée par voie rectale avec une seringue sans aiguille que l'on introduit dans l'anus doucement.

La morphine peut également être responsable de sécheresse buccale et de constipation. Il faut penser à maintenir une bonne hydratation, des soins de bouches peuvent être réalisés par l'infirmier pour le confort du malade.

L'infirmier doit toujours penser à mettre en oeuvre des "petits moyens" de lutte contre la douleur :

  • toucher le patient ;
  • massage doux (muscles et membres inférieurs) ;
  • friction des zones d'appuis (prévention de la survenue d'escarre chez les personnes alitées ; - hydratation et graissage de la peau ;
  • positions antalgiques adaptées (utilisation de coussins, de drap aux points d'appui...) ; - soins de confort.

La parole comme moyen de lutte :

L'infirmier doit écouter les plaintes du patient et adopter une attitude calme et empathique. Il doit permettre au patient d'exprimer ses douleurs et ses craintes.

La prise en charge de la douleur chez un patient inquiet et tendu sera plus difficile. C'est pourquoi, le soignant devra rassurer et apaiser le malade par des paroles bienveillantes. Le traitement antalgique devra être mis en place après une évaluation de la douleur et sera réadapté grâce à des évaluations régulières.

L'observation et l'écoute sont indispensables pour une prise en charge de qualité.

La douleur ne doit pas être sous-estimée par l'infirmier

Développement et Santé n°181, 2006