Faux médicaments

Par Philippe Reinert Pédiatre, hôpital Intercommunal, Créteil, France

Publié le

Vaccins, antibiotiques, antipaludéens, contraceptifs : 7% des produits pharmaceutiques sont des contrefaçons, selon l'OMS. Ce trafic lucratif, en pleine expansion touche toute la planète, mais surtout l'Asie et l'Afrique.

Entre 1982 et 1999, l'OMS a relevé 770 affaires de contrefaçons à grande échelle ayant entraîné près de 10 000 morts en 10 ans !

D'après les firmes pharmaceutiques, tout ou presque tout peut être copié : les substances, la composition, la notice, l'emballage, le nom du fabricant et même les certificats de contrôle de qualité.

Que contiennent les médicaments contrefaits ?

Soixante pour cent ne contiennent aucun principe actif récemment, en Colombie, des vitamines et des antitussifs ne contenaient que... du ciment !

Plus grave : lors d'une grande épidémie de méningite à méningocoque A au Niger, des milliers d'ampoules de vaccins provenant du Nigeria ne contenaient que de l'eau. Plus de 60 000 personnes avaient déjà été vaccinées... avec de l'eau. Ce crime a entraîné de nombreux morts !

  • 19 % des imitations sont mal dosées.
  • 16 % contiennent d'autres substances.
  • 5 % seulement des faux médicaments testés présentent la même qualité que l'original.

Comment lutter contre ce fléau ?

Il faut tout d'abord se méfier des prix cassés. Ainsi, en 2000, au Cambodge, pays où le paludisme est très résistant, des bottes de méfloquine (puissant antipaludéen) étaient vendues 7 dollars les 100 comprimés. Ce prix ridiculement bas aurait dû éveiller les soupçons, mais les villageois se laissèrent tenter. Il a fallu une trentaine de morts pour que des enquêteurs découvrent que cette méfloquine ne contenait aucune substance active.

L'industrie pharmaceutique chiffre en milliards de dollars les dommages occasionnés par cette concurrence illégale. Elle a pourtant beaucoup de mal à la combattre.
En effet, nombre d'entreprises ne souhaitent pas que l'on sache que leurs produits sont contrefaits, de peur de voir les clients méfiants ne plus acheter leurs médicaments.
Curieusement, peu de firmes pharmaceutiques ont intenté des procès aux contrefacteurs.

Que font alors les Etats ?

Des laboratoires nationaux de contrôle de qualité effectuent des prélèvements au hasard à tous les niveaux de la distribution mais cela coûte cher et de nombreux pays ne peuvent s'offrir de tels investissements.

Développement et Santé, n°160, août 2002