Le vaccin contre l'hépatite A : pourquoi il n'a pas sa place en Afrique

Par Par Catherine Dupeyron Biologiste, Créteil, France.  

Publié le

L’hépatite A est une infection aiguë du foie, qui évolue en général spontanément vers la guérison et qui est provoquée par le virus de l’hépatite A (HAV).
La transmission du virus d’une personne à l’autre est principalement féco-orale. On estime à 1,5 millions le nombre de cas cliniques d’hépatite A survenant chaque année. La prévalence des anticorps anti-HAV varie de 15 % à 100 % selon les régions du monde. L’incidence de l’hépatite A est étroitement liée au niveau de développement socio-économique du pays.

I. Hépatite A dans le monde

Dans les zones de forte endémicité, la plupart des habitants contractent l’infection dans l’enfance et elle reste asymptomatique. Il y a une corrélation directe entre l’âge et le risque de développer une forme symptomatique de la maladie à la suite de l’infection par le HAV. Chez les enfants de moins de 6 ans, elle reste en général asymptomatique, seuls 10 % d’entre eux développent un ictère. Produits en réaction à l’infection, les anticorps persistent ensuite toute la vie, protégeant la personne. Ainsi, les sujets qui ont fait un
épisode d’hépatite A sont immunisés à vie et n’ont pas besoin d’être vaccinés. On observe donc rarement l’hépatite A clinique dans ces régions.
C’est pour cette raison que l’OMS ne recommande pas la vaccination systématique contre l’hépatite A dans les pays de forte endémicité, dont fait partie l’Afrique. L’OMS considère que le fait que tous les
habitants contractent l’infection dès l’enfance représente une prévention efficace de l’hépatite A chez l’adolescent et l’adulte. Elle préfère mettre la priorité sur d’autres programmes de vaccinations de plus grande répercussion sur la Santé publique.

Le cas est différent pour les personnes vivant dans les zones de faible endémicité, Europe par exemple, qui n’ont pas été immunisées jeunes, et se rendent en pays de forte endémicité. La vaccination contre l’hépatite A est recommandée pour les voyageurs.
En particulier, il est importantde vacciner les jeunes enfants nés en France et qui viennent passer leurs vacances en Afrique dans leur famille.
En ce qui concerne la vaccination contre l’hépatite A, nous renvoyons le lecteur à l’article paru récemment et qui est repris ci-dessous.

II. Vaccination contre l'hépatite A

L'hépatite A est une infection hépatique provoquée par le virus de l'hépatite A (VHA), dont l'évolution, le plus souvent bénigne, peut être grave.
Sauf cas particulier (affection hépatique chronique), ce vaccin n'est pas justifié à titre systématique en Afrique.

1. Épidémiologie

La répartition de la maladie peut se subdiviser en 3 zones géographiques :

Zone présentant un taux élevé d'hépatite A

Elle se situe dans les pays en développement où les conditions sanitaires et l'hygiène sont médiocres (Afrique sub-saharienne, Moyen-Orient, états de l'ex-URSS, sous-continent indien, Chine et Amérique centrale). Le risque de contracter une hépatite A au cours de la vie est de 90 %, le plus souvent au cours de la petite enfance.
L'infection est généralement asymptomatique, les épidémies sont peu fréquentes car les enfants plus âgés et les adultes sont immunisés. Le taux de morbidité est faible, les flambées sont rares. C'est pourquoi le vaccin n'a pas d'intérêt sauf pour les patients atteints d'affection hépatique chronique.

Zone intermédiaire

Elle comporte les pays où émerge une population adulte réceptive à l'infection, surtouten milieu urbain. Grâce à l'amélioration des conditions sanitaires, les enfants échappent à l'infection. De grandes flambées peuvent se déclarer avec un taux de morbidité plus élevé car la maladie atteint des sujets plus âgés.

Zone présentant un taux faible

Ce sont les pays développés, où la maladie atteint les adolescents et les adultes à risques (toxicomanes, population précaire, personnes se rendant dans des zones à risque, sectes).

2. Transmission

Le mode de transmission essentiel découle du péril oro-fécal : une personne non infectée ou non vaccinée boit ou mange un produit qui a été contaminé par les fèces d'un sujet infecté par le VHA. Cette maladie est étroitement associée à un assainissement insuffisant et à une mauvaise hygiène individuelle (maladie des mains sales).
La transmission par l'eau est possible mais plus rare, et s'observe lorsque l'eau est contaminée par des eaux usées ou insuffisamment assainies.
La transmission par voie sanguine est possible mais
rare.

3. Clinique

L'incubation dure de 15 à 50 jours, en moyenne 30 jours.
Avant l'âge de 6 ans, la maladie est généralement asymptomatique.
Chez l'adulte, elle est marquée dans 70 % des cas par un ictère cutanéo-muqueux franc, régressif en 10 à 20 jours.
L'évolution est généralement favorable mais entraîne souvent une asthénie prolongée. Dans 15 % des cas, elle est prolongée et dure plusieurs semaines ou mois.
Dans 1 à 2 % des cas, les rechutes sont possibles après guérison complète ; parfois on observe seulement une rémission partielle.
Le risque de formes fulminantes augmente avec l'âge, c'est ce qui fait la gravité potentielle de cette maladie, le seul traitement étant alors la greffe hépatique.
Dans les autres cas, le traitement est exclusivement symptomatique.

4. Diagnostic positif

Il repose sur la détection dans le sang de la présence des IgM spécifiques anti-VHA, témoignant d'une infection récente, recherchées par technique ELISA.
Les IgM apparaissent lorsque les transaminases ALAT sont à leur pic, en début d'ictère et disparaissent en quelques mois. Les IgG anti-VHA apparaissent à la phase aiguë et restent présentes toute la vie.

5. Vaccination

Il s'agit de vaccins entiers inactivés contre le virus de l'hépatite A.
Il existe également un vaccin combiné à celui contre l'hépatite B, et un autre combiné au vaccin contre la fièvre typhoïde. La vaccination protège pendant plusieurs décennies.

Maladie Adulte Enfant Schéma vaccinal
Hépatite A 1 440 UI 720 UI M0 + M6 à M12
Hépatite A + Hépatite B Forme adulte Forme enfant M0 + M2 + M6 à M12
Hépatite A + fièvre typhoïde A partir de 16 ans Non Protection à J 14 après M0 Rappel hépatite A de M6 à M12 (refaire une injection si le risque de fièvre typhoïde persiste

Développement et Santé, N° 200, 2012