Le diabète sucré en Côte d'Ivoire : particularités épidémiologiques

Par Par Olivier Bismuth Médecin généraliste, Thiais, France.

Publié le

En Côte d'Ivoire, les seules données sur la prévalence du diabète datent de 1979 : une enquête, réalisée sur un échantillon représentatif de la population adulte, avait observé une hyperglycémie (> 1,5 g/l) chez 5,7 % des Ivoiriens.

Pour décrire les principales caractéristiques épidémiologiques du diabète, une étude a été effectuée a partir de tous les patients diagnostiqués dans un centre de référence, le centre antidiabétique d'Abidjan (CADA), entre le 1 janvier 1991 et le 31 décembre 2000 et, pour certains, suivis jusqu'en décembre 2004. Ont été retenus 10 320 patients diabétiques africains ayant effectué au moins une visite médicale, les femmes enceintes au moment du diagnostic ayant été exclues.

L'âge de découverte a été obtenu a partir des dates de naissance et d'enregistrement au centre. La population reconnue diabétique a été comparée à la population générale d'Abidjan (recensement de 1998).

Les patients ont été classés en

  • diabète de type 1: patients de moins de 35 ans au moment du diagnostic, ayant un indice de masse corporelle (IMC) inférieur a 20 et traités par insuline ;
  • diabète type 2 :
    • patients de plus de 35 ans au moment du diagnostic, ayant un IMC supérieur a 20 et traités par insuline ;
    • patients ayant été traités, durant la première année de suivi, par régime et/ou antidiabétiques oraux ;
  • indéterminés pour le reste des patients.

Figure 1. Evolution de l'enregistrement de nouveaux patients
au CADA de 1977 à 2004

1. Résultats

L'évolution du nombre de patients durant la période fait apparaître une augmentation du nombre d'admissions au CADA, ce qui ne peut pas être expliqué par la seule croissance de la population. Les fréquences d'antécédents personnels d'hypertension artérielle et familiaux du diabète sont de 20,1 % et 39 %.

On observe une prédominance :

  • des hommes : 58 % ;
  • des sujets âgés de 40 a 60 ans ;
  • des sujets du groupe ethnique Akan (48 %).

La classification selon le type du diabète montre la distribution suivante :

  • Type 1 : 11,8 %
  • Type 2 sans excès de poids : 48,7 %
  • Type 2 avec excès de poids : 39,5 %

2. Discussion

La surreprésentation masculine fait évoquer un recours différentiel aux soins mais a été retrouvé dans d'autres pays d'Afrique. Par ailleurs, le diabète surviendrait à un âge plus jeune que chez les individus de race blanche.

Il serait intéressant de poursuivre les études pour savoir si les disparités observées entre les cinq groupes ethniques sont le reflet d'une prédisposition génétique différentielle ou de coutumes et habitudes alimentaires différentes. La fréquence et l'augmentation des antécédents familiaux deviennent notables. Le diabète de type 2 sans surcharge pondérale surviendrait à un âge plus avancé et avec une glycémie intermédiaire.

Ces aspects particuliers de l'épidémiologie du diabète sucré appellent une plus grande attention des autorités et des acteurs de santé.

Tableau 1. Répartition des patients suivant le poids et le type de diabète.

Effectif Pourcentage
Poids \[IMC\* en kg/m²\] (n = 9950) Insuffisant \[moins de 18,50\] Normal \[18,50 - 25,00\] Préobèsité \[25,00 - 30,00\] Obésité, classe I \[30,00 - 35,00\] Obésité, classe II \[35,00-40,00\] Obésité, classe III \[40.00 et plus\] 959 4 358 3 028 1 176 306 123 9.6 43,8 30,4 11,8 3,1 1,2
Type et poids (n = 5 968) Type 1 \*\* Type 2 sans excès de poids Type 2 avec excès de poids 702 2 910 2 356 11,8 48,7 39,5
\* Indice de masse corporelle, \*\* Aucun excès de poids

Développement et Santé, n°193, 2009