Voies de transmission de l'infection

Par Catherine Dupeyron Biologiste, Créteil, France

Publié le

Ce sont les chemins empruntés par les agents pathogènes pour passer d’une personne à une autre.
Il est important de connaître ces voies car c’est le seul moyen de prévenir la transmission des maladies infectieuses.

Il existe 4 voies de transmission :

  • Voie aérienne
  • Voie orale
  • Voie parentérale
  • Voie de contact

I. Voie aérienne

1. Transmission par les gouttelettes de salive

ou les secrétions respiratoires d’un individu

On distingue :

a. La transmission dite directe par

les gouttelettes de salive elles-mêmes

Ce sont des particules relativement grosses > à 5 µm.
Produites par la toux, ou le fait de se moucher.
Elles sédimentent rapidement : ne vont pas plus loin qu’un mètre.
Elles se déposent sur les conjonctives ou les muqueuses de l’hôte.
Toutes les maladies dues à des micro-organismes de la sphère ORL peuvent être transmis de cette façon, mais c’est par cette seule voie que sont transmis les plus fragiles, ceux qui ne peuvent subsister dans le milieu extérieur comme :

  • les agents de méningites à méningocoque, à Haemophilus , les pneumonies.
  • les virus fragiles : oreillons, rubéole, grippe, fièvres hémorragiques.

A titre d’exemple :
Un éternuement produit environ 40 000 gouttelettes, le fait de tousser 3000, et cinq minutes de parole 3000.

b. La transmission dite aéroportée par des gouttelettes de salive asséchées, contenant des micro-organismes plus résistants, qui ont supporté la dessication

Les particules sont plus petites < à 5µm.
Elles peuvent être véhiculées sur de plus longues distances, et contiennent des agents infectieux viables.
Elles sont inhalées par l’hôte.
Peuvent être ainsi transmis : tuberculose, varicelle, variole, rougeole, varicelle, etc

C’est la voie de transmission de nombreuses maladies contagieuses. On la prévient par le nettoyage des mains et des surfaces, des mesures d’isolement et le port de masques si nécessaire.

2. Inhalation

Nous avons fait figurer dans ce chapitre la transmission par inhalation bien qu’il ne s’agisse pas là d’une transmission d’une personne à une autre mais d’une contamination par des microorganismes potentiellement dangereux contenus dans l’air.
Dans ce groupe on citera le cas particulier des Legionella où le patient s’infecte en respirant une eau contaminée sous forme d’aérosols (installations de climatisations défectueuses où circuits de distribution d’eau chaude (douches) vétustes et mal entretenus). Le danger dépendra de l’importance de la contamination de l’eau, et l’état des défenses immunitaires du sujet.
On citera également les infections produites par les Aspergillus, hôtes habituels de l’air ambiant. Ils sont inoffensifs pour les sujets en bonne santé, mais ils peuvent donner des maladies graves, les aspergillose, chez les patients gravement immunodéprimés.
Dans ces deux pathologies, il n’existe jamais de contamination interhumaine et il n’est pas utile d’isoler un patient atteint.

3. Blocs opératoires

Au cours des interventions chirurgicales les plaies opératoires peuvent constituer une large porte d’entrée à la contamination aérienne, de même des lors des accouchements.
Toutes les précautions nécessaires - usage des champs opératoires, et mesures d’hygiène extrêmement strictes - sont abordées dans des articles spécifiques ("Hygiène au bloc opératoire", "Hygiène à la maternité").

II. Voie orale

On appelle voie orale, ou entérique, la voie qui consiste à s’infecter en mangeant et en buvant des aliments contaminés. Les aliments sont contaminés le plus souvent à partir de l’eau, elle-même contaminée par les selles de patients porteurs ou malades, lorsque celles-ci n’ont pas été éliminées correctement. Les manifestations cliniques et l’incubation sont variées, la diarrhée étant la plus fréquente. De nombreuses maladies infectieuses et parasitaires, dont les agents responsables se développent dans le tube digestif, sont transmises à l’homme de cette façon : gastroentérites bactériennes et virales, choléra, fièvres typho-paratyphoïdiques, shigelloses, brucelloses, certaines hépatites virales, poliomyélite, et parasitoses diverses.
La prévention de ces maladies passe par le contrôle des selles et des excrétas, l’assainissement des eaux et la protection des eaux potables, ainsi que la bonne manipulation et la bonne conservation des aliments.

III. Voie parentérale

La voie parentérale, ou sanguine, est la voie qui traverse la peau ou les muqueuses pour pénétrer dans l’organisme. Il s’agit d’une introduction non naturelle du microbe. La pénétration peut être accidentelle ou occasionnée par un geste thérapeutique.

1. Pénétration par accident

Les plaies accidentelles sont dues à des ruptures de la peau, par coups ou blessures, par morsures ou par piqûres.
Les germes qui pénètrent alors dans l’organisme sont à la fois ceux de la peau du sujet accidenté, et ceux qui sont en rapport avec l’accident.
C’est ainsi que les plaies seront souvent souillées par les germes de la terre et de l’environnement, notamment les germes anaérobies sporulés de la famille des Clostridium, parmi lesquels les agents des gangrènes gazeuses et du tétanos (Clostridium tetani).
La pénétration de bactéries entraînera les réactions de défense de l’organisme qui mobilisera ses leucocytes ce qui conduira à la formation de pus. Mais ces défenses peuvent être dépassées et plus la bactérie sera pathogène et plus le risque d’infection généralisée sera grand.

Le nettoyage des plaies avec élimination des grains de terre et de sable est d’une grande importance.

Les morsures pourront amener les mêmes contaminations, avec en plus les risques de contamination par l’animal, s’il est atteint de Pasteurellose par exemple ou, beaucoup plus grave, de rage.
La prévention est la protection des contacts avec l’animal, notamment chez les enfants, et la vaccination contre la rage des animaux domestiques.
Les piqures d’insectes transmettront toutes les maladies qui peuvent être apportées par ces vecteurs : paludisme, fièvre jaune, dengue, maladie du sommeil etc.
La prévention constitue un vaste domaine de la lutte antivectorielle : désinsectisation, destruction des gites larvaires, utilisation de moustiquaires imprégnées et de répulsifs.
Le partage des seringues constitue une voie de contamination majeure chez les toxicomanes, contre laquelle il faut lutter par tous les moyens.
Toute réutilisation de seringue ou de matériel qui a été au contact du sang doit être prohibée.
Tout ce qui peut conduire à une transmission sanguine dans la vie courante doit être évité.
Les brosses à dents, rasoirs et autres objets de toilette ne doivent pas être partagés.
Les tatouages et piercings doivent être évités.

2. Pénétration consécutive à des gestes thérapeutiques

Tout objet qui pénètre sous la peau et dans les veines doit être absolument stérile, toute injection à partir d’un matériel non stérile est dangereuse. C’est le cas des aiguilles et seringues qui ont été seulement bouillies et non stérilisées et peuvent contenir encore des virus, comme ceux des hépatites B et C et du SIDA, ou des spores de bacille tétanique,particulièrement résistants à la chaleur.
Pour toutes ces raisons, le matériel à usage unique ne doit en aucun cas être "restérilisé" ni réutilisé.
Les pansements, les aiguilles à perfusion, les cathéters endoveineux doivent être considérés comme des matériels aseptiques et ne plus être touchés avec des mains non aseptisées une fois mis en place : les germes sont mobiles, et à partir de la peau ils remontent facilement le long du cathéter ou de l’aiguille et peuvent ainsi contaminer le sang du patient, provoquant des réactions et infections locales (phlébites) ou même générales (septicémies).
Les médecins, le personnel soignant et la direction des hôpitaux ont une très grande responsabilité dans ce domaine, notamment du fait des injections ou des prises de sang qui y sont réalisées.
Le contrôle de cette voie passe par l’asepsie, la stérilisation correcte des objets qui pénètrent sous la peau, et la fiabilité des gestes aseptiques dans toute thérapeutique invasive et le contrôle des procédures.

IV. Voies de contact

Il s’agit de la transmission de microbes d’une personne à l’autre par contact : contact simple et infections sexuellement transmissibles

1. Infections transmises par contact simple

C’est une transmission de peau à peau. C’est ainsi que sont transmises les infections à bactéries pyogènes de type impétigo, très contagieuses, provoquées par des streptocoques ou des staphylocoques, que l’on rencontre notamment chez les enfants.
Sont également transmises par voie cutanée des infections à virus. En plus de la voie aérienne c’est un des modes de transmission des virus du groupe Herpès Varicelle Zona.
Des parasites sont également transmis par contact, poux, puce et gale par exemple
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La voie de contact est par ailleurs très importante dans les hôpitaux et toutes les collectivités où sont réalisés des soins. Les agents infectieux sont transmis d’un patient à un autre par l’intermédiaire des mains des soignants, médecins ou infirmiers. On parle de transmission manuportée. Cette voie a été de tout temps une cause majeure de l’infection hospitalière, longtemps méconnue et encore beaucoup trop souvent négligée. Le soignant contamine ses mains en s’occupant d’un patient infecté, les bactéries restent vivantes sur sa peau et il les transmet aux patients suivants.
Ce mode de transmission est particulièrement préoccupant avec les traitements antibiotiques, c’est pourquoi il doit être particulièrement surveillé dans les hôpitaux. En effet les antibiotiques agissent non seulement sur le germe qui est visé par la thérapeutique, mais sur toute la flore du patient, qu’il s’agisse de bactéries saprophytes, commensales ou pathogènes, en détruisant les bactéries les plus sensibles et en laissant sur le terrain les plus résistantes qui ont alors toute la place pour proliférer. Ainsi à l’hôpital où se trouvent de nombreux patients, dont une grande partie est susceptible de recevoir une antibiothérapie, on observe un déséquilibre de la flore normale au profit d’espèces résistantes aux antibiotiques, ce qui fait que l’hôpital représente un réservoir de germes résistants, qui risquent de se répandre de malade à malade par contact. En cas d’infection il est ensuite beaucoup plus difficile de débarrasser un patient d’une bactérie résistante à de nombreux antibiotiques, que d’une bactérie ayant ses caractères de sensibilité normaux. Les traitements seront plus difficiles car plus longs, plus agressifs, plus coûteux, et dans les circonstances les plus extrêmes, impossibles.

Il a été démontré de façon scientifique que le lavage des mains, réalisé correctement, élimine ces bactéries qui survivent sur les mains des soignants, empêchant ainsi la transmission interhumaine.

A l’hôpital ou au dispensaire, pour éviter les transmissions par contact, la surveillance et l’effort doivent être permanents. C’est chaque geste qui doit être contrôlé. Il s’agit de décontaminer ses mains de façon à en éliminer les germes nombreux qui ont été acquis sur un premier malade avant d’aborder un autre malade de façon à ne pas lui transmettre les germes du premier. Cette décontamination se fait par le lavage des mains qui doit être systématique et pratiqué entre chaque malade. Si les mains ont été bien lavées une première fois on peut envisager l’utilisation d’alcool, ou de solution hydro-alcooliques, mieux tolérées. Voir l’article sur le lavage des mains.

2. Maladies infectieuses sexuellement transmissibles (MST)

On regroupe sous ce nom toutes les maladies infectieuses dont le mode de transmission est un rapport sexuel. D’après l’OMS, les MST sont responsables chaque année de 250 millions de nouveaux cas. Les agents responsables peuvent être des bactéries, des virus, des protozoaires, des champignons agents de mycoses et des ectoparasites. Un seul rapport sexuel peut entraîner une contamination !
Certaines de ces maladies sont graves et jamais guéries (VIH, Hépatite B), d’autres sont curables mais présentent des risques de complications graves si elles ne sont pas soignées à temps.
Il s’agit d’un vaste sujet, dont nous ne ferons ici qu’un tableau récapitulatif (ci-dessous)

La prévention des MST passe par une utilisation systématique de préservatifs de bonne qualité et employés de manière correcte. Elle nécessite une bonne hygiène personnelle. Il faut consulter rapidement en cas d’écoulements ou d’ulcérations génitales.

La notion des voies de transmission est d’une grande importance pour la prévention des infections. La voie aérienne et la voie orale sont les voies de transmission des grandes épidémies de maladies contagieuses, la voie parentérale et la voie de contact sont les voies les plus importantes à contrôler pour prévenir la transmission des infections lors des soins à l’hôpital.

C’est la connaissance des voies de transmission de l’infection qui va permettre de mettre en place les méthodes d’isolement adaptées et efficaces.

Lorsqu’il s’agit d’une transmission infectieuse, dans une famille ou un village, en dehors de l’hôpital ou d’une collectivité de soins on a l’habitude de parler d’infection communautaire, lorsqu’il s’agit d’une transmission à l’hôpital ou au dispensaire, on appelle cela une transmission nosocomiale.
MST dues à des bactéries
Maladie Agent responsable
Gonococcie Neisseria gonorrhoeae
Chez l’homme : infection de l’urètre donnant des brûlures très douloureuses à la miction, avec un écoulement purulent urétral. Peut évoluer vers une atteinte de la prostate, des vésicules séminales et des épididymes. Chez la femme : vulvo-vaginite, leucorrhées et cervicite peu douloureuses. Peut gagner les trompes et provoquer une salpingite.
Syphilis Treponema pallidum
Incubation 15 à 20 jours Syphilis primaire : chancre indolore au niveau des organes génitaux externe, du col de l’utérus, des plis de l’anus. Ganglion satellite inguinal. Syphilis secondaire : du deuxième mois à la quatrième année environ. Roséole syphilitique et plaques muqueuses (vulve, région anale, bouche). Eruptions cutanées sur tout le corps. Syphilis tertiaire et quaternaire : après 5 à 10 ans. Peut atteindre tous les organes.
Chancre mou Haemophilus ducreyi
Incubation 2 à 6 jours. Ulcération douloureuse.
Donovanose Calymmatobacterium granulomatis
Granulomes inguinaux ou génitaux sous-cutanés, ulcération.
Maladie de Nicolas Favre Chlamydia trachomatis
Phase primaire : incubation 15 jours, puis chancre, ganglions, fièvre. Phase de généralisation : lésions cutanées et ostéo-articulaires. Phase tertiaire : oedèmes génitaux, éléphantiasis, ulcérations et adénopathies.

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MST dues à des virus Autres MST
Herpès génital Virus d’Epstein-Barr : mononucléose Cytomegalovirus Molluscum contagiosum Papillomavirus humains Hépatites B et C SIDA Candidose génitale Mycoplasmes Gale Poux