Vaccination contre l'hépatite B : aspects théoriques

Par Philippe Reinert Pédiatre, Créteil, France.

Publié le

Quand un sujet est infecté par le virus de l’hépatite B, il peut :

  • soit être porteur chronique dans 8 à 10 % des cas, avec un risque ultérieur de développer une cirrhose et un cancer du foie (80 % des cancers du foie sont dus aux virus B ou C) ;
  • soit guérir et éliminer le virus en produisant des anticorps anti-HBs dirigés contre l’enveloppe du virus.

On a pu démontrer que le sérum des sujets guéris avait un effet protecteur contre l’infection expérimentale du chimpanzé. L’idée de fabriquer un vaccin en utilisant comme antigène l’enveloppe du virus était séduisante : ainsi, en 1975, on isola du plasma de porteurs chroniques du virus l’enveloppe qui fut inactivée puis injectée
à l’homme. Les premiers résultats furent remarquables, avec une production élevée d’anticorps anti-enveloppe et surtout une protection clinique supérieure à 90 % (vaccin plasmatique).
Par cette technique, il n’était pas possible de produire des quantités importantes de vaccins.
On a ensuite fait produire l’antigène par des cellules de mammifères ou des levures (incorporation du gène de la protéine d’enveloppe dans l’ADN de ces cellules), ce qui a permis la mise au point de vaccins recombinants aussi efficaces que les vaccins plasmatiques et à moindre coût.

I. Immunogénicité

Le pouvoir immunogène du vaccin peut être évalué par le dosage des anticorps anti-Hbs.
On peut considérer qu’une réponse protectrice est obtenue chez plus de 90 % voire 95 % des sujets vaccinés : nourrissons, adultes jeunes et nouveau-nés.
Les facteurs de moindre réponse sont l’âge supérieur à 40 ans et le sexe masculin. Des études récentes ont montré que les meilleurs répondeurs étaient les nourrissons.
Avec 3 injections, dans un schéma à 3 doses (0, 1, 6 mois ou 0, 5, 14 semaines), on entraîne une protection supérieure à 90 % et l’immunité induite est quasi-définitive. Les taux d’anticorps sont compris entre 10 et 100 mUI/mL.
Dans tous les cas, il est nécessaire qu’un intervalle d’au moins 5 mois soit respecté entre la 2ème et la 3ème dose pour obtenir une franche séroconversion. Par contre, un espacement des injections ne provoquera pas une diminution de la réponse anticorps.
Un schéma à 4 doses est recommandé pour les prématurés de moins de 32 semaines ou de poids inférieur à 2 kg.
Enfin, quand l’immunisation est urgente (risque important de contamination), on peut administrer 3 doses à un mois d’intervalle, en sachant qu’un rappel un an plus tard sera indispensable.

Les rappels ne sont plus nécessaires à l’exception des insuffisants rénaux en dialyse.
Fait important - et c’est une particularité de ce vaccin - chez beaucoup de sujets les anticorps anti-hépatite B disparaissent du sang. Cela ne veut pas dire que le sujet n’est plus protégé : en effet, il persiste une mémoire immunitaire médiée par les lymphocytes T et B. Si le sujet rencontre le VHB, une réponse immu-
nitaire rapide se produit, avec réapparition des anticorps circulants, sans aucun signe d’infection.

II. Chez le nouveau-né d’une mère porteuse du VHB

Le risque d’hépatite aiguë et surtout de portage chronique est grand. L’administration du vaccin dans les premières heures de vie est une nécessité absolue.
A ce prix, le vaccin protège le nouveau-né dans plus de 90 % des cas. L’administration d’anticorps anti-VHB entraîne une protection supérieure, mais leur coût élevé est un frein à leur utilisation.

III. Quand vacciner ?

L’hépatite B étant essentiellement une maladie sexuellement transmissible, on a longtemps proposé la vaccination à l’adolescence. Maintenant, surtout dans les pays à forte incidence, il est souhaitable de vacciner le plus tôt possible, à la naissance ou dans les premiers mois, le vaccin étant associé à d’autres vaccins (DT Coq, Dtcoq polio Haemophilus b, voire DT Coq Polio Haemophilus b Hépatite B).

IV. Qui vacciner ?

Tous les nourrissons bien sûr, mais en priorité les
sujets à risque :

  • professionnels de santé,
  • sujets infectés par le VIH,
  • homosexuels,
  • toxicomanes utilisant des drogues injectables,
  • tout sujet susceptible d’être transfusé,
  • insuffisants rénaux,
  • entourage d’un sujet infecté par le VHB.

V. Contre-indications et effets indésirables

La survenue de cas de sclérose en plaques, peu de temps après la vaccination, surtout en France, avait provoqué une suspicion. En fait, de nombreuses études internationales ont innocenté le vaccin.
On a même démontré que la vaccination chez les sujets atteints de sclérose en plaques ne modifiait pas le cours de la maladie.

En résumé

Le vaccin contre le VHB est le premier vaccin protégeant contre un cancer (et une cirrhose du foie). Pour toutes les raisons que nous avons vues, l’OMS a introduit ce vaccin dans le PEV.
Rappelons que l’hépatite B est l’une des principales maladies potentiellement mortelles pouvant être prévenue par la vaccination.