Réflexions sur le diabète dans le monde
Le nombre de diabétiques dans le monde est un pleine expansion : évalué à 110 millions en 1994, il atteindra 240 millions en 2010, l'Afrique et l'Asie rejoignant peu à peu les USA et l'Europe. En effet, selon l'OMS, pendant cette période de 16 ans, l'Afrique connaîtra une augmentation de 55% du nombre de ses diabétiques, et l'Asie de 46 %... En Afrique, l'importance du diabète a été longtemps sous-évaluée car la maladie n'était ni recherchée ni prise en charge.
Le diabète est une maladie où interviennent des facteurs génétiques (dont le rôle exact n'est pas encore totalement défini). Il est caractérisé par une élévation de la concentration de sucre (glucose) dans le sang.
On distingue 2 types de diabète :
- le diabète de type 1, ou diabète insulinodépendant : il apparaît généralement au cours de l'enfance, est dû à la destruction des cellules pancréatiques qui fabriquent l'insuline, hormone hypoglycémiante ;
- le diabète de type 2, ou diabète non insulinodépendant (DNID), est de loin le plus fréquent. Il se manifeste après l'âge de 40 ans et se caractérise par deux anomalies une déficience en insuline et une résistance à l'insuline. Il s'accompagne d'une obésité dans 60% des cas.
Les causes de la progression du diabète de type 2
Le diabète a été longtemps perçu comme une fatalité alors qu'il n'est, pour l'essentiel, que l'une des conséquences d'un mode de vie caractérisé par une sédentarité (avec faible activité physique) associée à des apports caloriques trop importants.
Le développement du mode de vie occidental explique l'extension de la maladie dans le monde. En effet, du fait des facteurs génétiques, l'accroissement actuel du nombre des diabétiques est lié d'une part à la conjonction d'une sélection au fil des siècles des gènes prédisposant au diabète, d'autre part à la modification récente des modes de vie. Le diabète se déclare chez les sujets génétiquement prédisposés après des années d'une alimentation trop riche et de sédentarité.
Cette constatation peut être éclairée par des exemples précis. Des études ont été faites dans des populations qui ont vécu isolées et qui ont concentré certains gènes par endogamie (situation d'un groupe où les mariages se font entre membres du groupe).
L'exemple le plus caractéristique est celui des habitants des îles Nauru clans l'océan Pacifique. L'exploitation de gisements de phosphates découverts sur ces îles a permis un enrichissement considérable de la population et... l'apparition de cas de diabète en nombre croissant. Les habitants ont abandonné la pêche et l'agriculture au profit de l'oisiveté et de la consommation d'une nourriture essentiellement importée d'Australie. Ils sont devenus obèses, et le diabète a finalement touché 60% de la population ! La tendance s'est ensuite inversée, car la reproduction était freinée par les troubles sexuels liés à la maladie.
Pourquoi les habitants des îles Nauru ont-ils sélectionné les gènes du diabète de façon aussi efficace ? On peut avancer quelques explications leurs ancêtres sont arrivés sur ces îles après de longs voyages en canoë auxquels résistaient ceux qui avaient le plus de graisse au départ. II faut ajouter que le quart de la population est mort de Faim sous l'occupation japonaise entre 1942 et 1945.
Au cours de l'histoire de l'humanité, les conditions d'approvisionnement alimentaire ont été fluctuantes et généralement insuffisantes. Les individus qui, génétiquement, avaient une plus grande capacité de stockage des graisses étaient les plus aptes à la survie. En effet, une plus grande proportion des calories qu'ils absorbaient lors des rares périodes d'abondance était transformée en graisse, grâce à quoi ils surmontaient mieux le retour de la pénurie. Des individus ayant reçu en héritage ces gènes du diabète autrefois protecteurs, sont confrontés aujourd'hui à la surabondance calorique et à la sédentarité, et développent le diabète.
Ce qui, autrefois, était un avantage peut être aujourd'hui un sérieux handicap pour la santé des porteurs de ce gène. Les pays où l'on souffre de la faim et de la malnutrition ne rencontrent pas ce type de problème.
Développement et Santé, n°193,2009