Place de l’échographie dans un centre de référence
I. Choix du sujet
Il est important de parler de l'échographie pour souligner les difficultés rencontrées par de nombreuses femmes dans certaines localités des pays en développement, souvent très peuplées et où la maternité se déroule fréquemment dans des conditions difficiles.
Ces difficultés, qui concernent tant les personnels soignants (infirmiers, sages-femmes et médecins) que les matériels (en particulier l'échographe), exposent ces femmes à des risques pouvant mettre en jeu le pronostic vital, et ce pendant toute la durée de la grossesse.
Tous les personnels de santé s'accordent sur le fait que les grossesses abdominales menées à terme sont extrêmement rares et pourtant, en 5 ans, nous en avons vu 4 à l'hôpital central des armées de Brazzaville. Deux d'entre elles n'ont pas été suivies car elles habitaient dans des localités n'ayant pas de personnel de santé. Elfes dot rejoint la capitale en raison de douleurs abdomino-pelviennes lancinantes.
Pour les deux autres, habitant la capitale et suivies dans les cabinets médicaux de la ville, les échographies demandées n'ont pas été réalisées car elles manquaient de moyens financiers : 10000 FCFA pour une échographie.
Ces 4 femmes sont admises chez nous déjà à terme, une laparotomie pour grossesse abdominale a été réalisée. Nous rapportons ces cas pour dire que, si l'échographie de diagnostic et de datation - qui doit être effectuée entre 7 et 12 semaines - avait été faite, le diagnostic d'une GEU aurait été posé et le traitement réalisé.
La GEU tue même dans les pays développés, c'est la première cause de décès pendant le premier trimestre de la grossesse, malgré l'existence d'un plateau technique équipé pour le diagnostic et la prise en charge. Dans ces localités, combien de femmes meurent d'une GEU rompue faute de diagnostic alors que, quelques jours auparavant, elles se plaignaient d'algies pelviennes et de métrorragies ?
Un arrêt cardio-respiratoire, dü à l'hypovolémie consécutive à une inondation péritonéale, est responsable de l'évolution fatale.
II. Importance des échographies pendant la grossesse
1. Au premier trimestre (7 - 12 SA)
échographie de diagnostic et de datation
Elle est essentielle. Elle permet de confirmer le diagnostic (existence ou non de la grossesse), de connaître la localisation (GIU, GEU), de suivre l'évolution (grossesse évolutive ou non évolutive), de détecter des grossesses pathologiques (môle hydatiforme), ou multiples (grossesse gémellaire).
En principe, avant d'ouvrir la fiche de CPN, il faut avoir les résultats d'une échographie confirmant la grossesse. Beaucoup ont pris une aménorrhée secondaire non gravidique pour une grossesse et ont incité certains personnels de santé à ouvrir la fiche de CPN. La patiente a malgré cela ses CPN et nous arrive pour un soi-disant dépassement de terme.
Nous notons à notre examen un utérus non gravide de petite taille. C'est à l'échographie que nous avions pu convaincre la patiente en lui montrant les images d'un utérus vide. De telles erreurs peuvent nous emmener en justice. Une simple échographie précoce permettrait de confirmer le diagnostic et d'agir.
2. Au deuxième trimestre (20-22 SA)
échographie morphologique
Une échographie morphologique est importante pour :
- Rechercher des malformations fcetales qui pourraient être incompatibles avec la poursuite de la grossesse.
- Indiquer la zone d'insertion placentaire (ex. placenta bas inséré, qui comporte un risque hémorragique).
3. Au troisième trimestre (30-32 SA)
échographie de croissance
Elle permet de diagnostiquer :
- Un retard de croissance intra-utérin.
- Une macrosomie.
- Des anomalies de la quantité du liquide amniotique (hydramnios, oligo-amnios ou anamnios).
- Une anomalie d'insertion placentaire (placenta bas inséré).
- Des anomalies que l'on n'a pas pu diagnostiquer au 2ème trimestre de la grossesse.
Conclusion
L'échographie est donc essentielle dans le suivi de la grossesse.
Parmi les trois échographies que l'on demande de façon obligatoire, il est indispensable de faire au moins la première, c'est-à-dire celle qui confirme le diagnostic et la datation, surtout dans nos pays en développement où, faute de moyens financiers, de nombreuses femmes ne peuvent faire les trois.
La grossesse est souvent, dans ces pays, un événement auquel on ne s'attendait pas, il n'y a donc pas de bilan prénuptial. "je suis enceinte, j'attends mon bébé, je dois déjà préparer progressivement ma layette, c'est tout, c'est un processus naturel. Advienne que pourra".
Développement et Santé, n°197/198, 2010