Nouveaux vaccins d’intérêt pour l’Afrique
I. Vaccinations contre les infections invasives à pneumocoque
1. Les infections à pneumocoque
Les manifestations graves dues au pneumocoque comprennent des pneumonies, des méningites bactériennes, des septicémies ou des bactériémies.
Le pneumocoque est également responsable de maladies moins graves comme des otites, des bronchites ou des sinusites.
Il existe plus de 90 sérotypes différents du pneumocoque, les 13 les plus courants sont responsables de 80 % des maladies pneumococciques.
La vaccination antipneumococcique est d'autant plus importante que le germe présente une résistance croissante aux antibiotiques.
Le portage est essentiellement rhinopharyngé.
La transmission se fait par voie respiratoire.
2. Les vaccins
1. Pneumo 23
Conçu dans un premier temps, le Pneumo 23 est un vaccin polyosidique non conjugué contenant 23 sérotypes différents responsables de 90 % des infections invasives pneumococciques.
Ce vaccin n'induit pas de protection chez l'enfant de moins de 2 ans en raison de l'immaturité immunologique à cet âge.
Recommandations
Le Pneumo 23 est recommandé chez les sujets de plus de 2 ans appartenant au groupe à risque d'infection grave à pneumocoque - drépanocytose, infection à VIH (voir tableau) - avec revaccination tous les 3 à 5 ans.
L'administration se fait en une seule injection sous¬cutanée ou intramusculaire.
Contre-indications
- Hypersensibilité connue à l'un des composants du vaccin.
- Vaccination par le Pneumo 23 datant de moins de 3 ans.
- Un état fébrile > 38,5° C doit faire différer la vaccination.
Les effets indésirables rapportés sont de légères réactions locales (douleur, érythème, oedème), une fièvre parfois importante chez l'adulte.
Conservation entre + 2° C et + 8° C, le vaccin ne doit pas être congelé.
L'efficacité est incomplète (50 à 70 % pour les bactériémies). Elle est faible chez l'immunodéprimé et une prophylaxie systématique continue (pénicilline) est indispensable chez ces patients.
Le vaccin n'induit pas d'immunité muqueuse, le portage rhinopharyngé n'est pas modifié.
2. PREVENAR®
Le PREVENAR® est un vaccin antipneumococcique conjugué à une protéine diphtérique, comprenant actuellement les 7 sérotypes de Streptôcoccus pneumoniae responsables des pneumococcies graves, les plus fréquentes chez les enfants âgés de 2 mois à 5 ans (sérotypes 4, 6B, 9V, 14, 19F, 23F). Il ne contient pas, pour l'instant, le sérotype 1, souvent responsable d'infections sévères en Afrique. Il est immunogène dès le deuxième mois de vie. Un nouveau vaccin à 13 valences comportant en particulier les sérotypes 1 et 19 A (qui est de plus en plus souvent responsable d'infections graves) va être disponible. Ce nouveau vaccin sera davantage adapté à l'Afrique.
Administration
Il doit être injecté par voie intramusculaire.
Schéma vaccinal
- Chez le nourrisson à partir de 6 semaines : 2 doses injectées à 2 mois d'intervalle, le plus souvent à 2 et 4 mois en même temps que la première et la troisième injection du DTCP.Une troisième injection de rappel est recommandée à l'âge de 12 mois.
- Chez l'enfant âgé de 12 à 24 mois non vacciné : une dose unique de rattrapage peut être injectée.
- Le prématuré reçoit 3 doses à 1 mois d'intervalle, et un rappel à 12 mois.
- Les nourrissons à haut risque d'infection pneumococcique grave reçoivent 3 doses à 1 mois d'intervalle et un rappel à 12 mois, puis le Pneumo 23 à partir de 2 ans tous les 3 à 5 ans.
- Les enfants de 2 à 5 ans à haut risque d'infection pneumococcique grave et qui n'ont pas été vaccinés peuvent recevoir 2 injections à 2 mois d'intervalle, puis être vaccinés 2 mois plus tard par le Pneumo 23, puis Pneumo 23 tous les 3 à 5 ans.
Effets indésirables
Le vaccin est bien toléré. On observe de fréquentes réactions au point d'injection (érythème, douleur ou oedème), des troubles gastro-intestinaux (vomissements, diarrhée, perte d'appétit), exceptionnellement des convulsions.
Conservation
Le PREVENAR® doit être conservé entre + 2° C et + 8° C et ne doit pas être congelé.
Contre-indications
Hypersensibilité à l'un des composants du vaccin, notamment à l'anatoxine diphtérique.
Comme les autres vaccins, la vaccination par le PREVENAR® doit être différée en cas de maladie fébrile > 38,5° C.
Associations
Le PREVENAR® peut être administré en meme temps que les autres vaccins, à un point d'injection différent.
Efficacité
Dans les pays où la vaccination a été généralisée, la survenue de pneumococcies graves a diminué de façon importante.
Cependant, on commence à noter l'émergence de pneumococcies dues à des sérotypes de pneumo¬coques non contenus dans le vaccin, qui pourraient devenir dominants.
Vaccinations antipneumococciques | |
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Age | Schéma vaccinal |
Nourrisson bien portant de 2 à 12 mois (à partir de 6 semaines) | PREVENAR® : 2 doses à 2 mois d'intervalle Rappel à 12 mois |
Prématuré | PREVENAR® : 3 doses à 1 mois d'intervalle Rappel à 12 mois |
Nourrisson à risque | PREVENAR® : 3 doses à 1 mois d'intervalle Rappel à 12 mois PNEUMO 23 : à partir de 2 ans tous les 3 à 5 ans |
Enfant de 12 à 24 mois non vacciné | PREVENAR® : 1 dose |
Enfant de 2 à 5 ans à risque non vacciné | PREVENAR® : 2 doses à 2 mois d'intervalle PNEUMO 23 : 2 mois plus tard puis tous les 3 à 5 ans |
Sujets à risque d'infections pneumococciques graves |
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II. Vaccin anti rotavirus
Le rotavirus est la cause la plus fréquente de diarrhée grave chez le nourrisson et le jeune enfant.
La plupart des décès surviennent dans les pays en développement, où l'on considère que 70 % des enfants ont un épisode de diarrhée avant l'âge de 12 mois. Chaque année, le rotavirus est responsable de 800 000 à 1 000 000 de morts.
1. Le rotavirus
Il existe de nombreuses souches, mais 5 sérotypes sont responsables de la plupart des gastro-entérites à rotavirus.
La transmission se fait par voie oro-fécale de personne à personne, ou indirectement par l'intermédiaire de l'eau, des aliments ou des surfaces conta-minés, d'où l'importance de l'hygiène préventive. Une gastro-entérite sévère peut entraîner une déshydratation, voire le décès. Il n'existe pas de traitement antiviral spécifique et la lutte contre la déshydratation par les SRO est essentielle. L'allaitement maternel a un effet protecteur certain.
2. La vaccînation (voir tableau)
Un premier vaccin, commercialisé en 1998 aux USA, avait été retiré au bout d'un an en raison de la survenue d'invaginations intestinales chez certains enfants vaccinés.
Les vaccins actuellement disponibles ont prouvé leur innocuité et leur efficacité. Deux vaccins sont commercialisés. Ce sont des vaccins oraux buvables qui ne doivent jamais être injectés.
Vaccin oral vivant monovalent (souche RIX4414 vivante atténuée)
Il se conserve entre + 2° C et + 8° C à l'abri de la lumière et ne doit pas être congelé.
- C'est un vaccin lyophilisé, qui se reconstitue et est administré par voie orale.
- La vaccination se fait en deux prises. Les dates d'administration du vaccin ont été fixées pour éviter tout risque d'invagination, celle-ci épargnant généralement les nourrissons de moins de 12 semaines.
Ainsi, la première dose doit être administrée à partir de l'âge de 6 semaines, mais pas après 12 semaines.
La deuxième dose est administrée après un intervalle d'au moins 4 semaines, au plus tard à l'âge de 24 semaines.
Vaccin oral vivant polyvalent à 5 valences (sérotypes de rotavirus humain-bovin G1, G2, G3, G4, P1(8))
Il se conserve entre + 2° C et + 8° C, et l'administration se fait par voie orale, selon un schéma de 3 doses. La première dose est donnée à partir de 6 semaines sans dépasser l'âge de 12 semaines, puis à intervalles de 4 à 10 semaines.
La vaccination doit être terminée au plus tard à l'âge de 26 semaines.
Ces vaccins peuvent être administrés simultanément aux autres vaccinations du nourrisson.
Effets indésirables
Les risques d'invagination intestinale à la suite de ces vaccins ne sont pas augmentés. Les réactions les plus fréquentes sont des pertes d'appétit, des diarrhées et vomissements, des fièvres ou une irritabilité.
Contre-indications
- Hypersensibilité à l'un des composants des vaccins.
- Antécédents d'invagination intestinale.
- Malformation congénitale non opérée de l'appareil gastro-intestinal pouvant prédisposer à une invagination intestinale.
- Déficit immunitaire connu ou suspecté. Le vaccin reste non recommandé chez les nourrissons ayant une infection à VIH asymptomatique.
- La vaccination doit être différée en cas de maladie fébrile sévère, de diarrhée ou de vomissements.
Efficacité
La protection contre les rotaviroses graves se prolon¬ge pendant les deux années suivant la vaccination. Bien entendu, ces vaccins ne protègent pas contre les diarrhées provoquées par les agents pathogènes autres que le rotavirus, les mesures préventives d'hygiène et la lutte contre la déshydratation avec les SRO restent primordiales.
Vaccin | Mode d'administration | Reconstitution | Schéma vaccinal | Conservation |
G1P[8] | Per os | Poudre + solvant pour solution buvable | 2 doses : 1ère dose à partir de l'âge de 6 semaines sans dépasser 16 semaines 2ème dose à intervalle d'au moins 4 semaines sans dépasser 24 semaines (le schéma vaccinal doit être terminé avant 6 mois) | Entre + 2° C et + 8° C |
G1P1[8] G2P[4] G3P[1] G4P1[8] G9P1[8] | Per os | Solution buvable | 3 doses : La première dose est donnée à partir de 6 semaines sans dépasser l'âge de 12 semaines, puis à intervalles de 4 à 10 semaines. La vaccination doit être terminée au plus tard à l'âge de 26 semaines | Entre + 2° C et + 8° C |
III. Vaccin antipapillomavirus humain (HPV)
L'infection à HPV est l'une des trois principales maladies sexuellement transmissibles et la pre¬mière infection virale sexuellement transmissible. L'HPV est très contagieux et la plupart des hommes et des femmes contractent l'infection à un moment de leur vie. Le préservatif n'est pas une protection suffisante contre l'HPV.
Il existe plus de 100 génotypes du virus. Parmi ceux-ci, les génotypes 16 et 18 sont responsables de plus de 70 % des cancers du col de l'utérus. Les génotypes 6 et 11 sont responsables de 90 % des condylotnes ano-génitaux. La plupart des cancers du col de l'utérus atteignent des femmes de 40 ans et plus. Quatre vingt dix pour cent des cas sont observés dans les pays en développement.
1. L'infection à HPV
La primo-infection est inapparente. La guérison survient dans 80 % des cas après 15 mois. Dans un faible pourcentage de cas, l'infection peut persister et conduire à une néoplasie intra-épithéliale du col de grade 1 à 3, et à des lésions précancéreuses de la vulve et du vagin.
Ces lésions évoluent vers un cancer du col de l'utérus, le délai entre l'infection initiale et l'apparition du cancer étant de 20 ans en moyenne.
Le dépistage des lésions du col utérin repose sur le frottis cervical.
2. Le vaccin anti HPV (voir tableau)
Les vaccins sont préparés à partir de protéines virales et ne contiennent pas de produits vivants. Ils induisent une production d'anticorps neutralisants qui protègent contre l'infection mais n'ont pas d'effet thérapeutique sur des infections à HPV préexistantes.
Deux vaccins sont commercialisés :
- Le vaccin quadrivalent contient des pseudoparticules virales de types 6, 11, 16 et 18. Il permet de prévenir les lésions précancéreuses et les cancers du col de l'utérus, ainsi que les condylomes ano-génitaux dus aux virus HPV contenus dans le vaccin.
- Le vaccin bivalent contient des pseudo-particules virales de types 16 et 18.
Il prévient les lésions précancéreuses et les cancers du col de l'utérus dus aux virus contenus dans le vaccin.
La vaccination est destinée à la jeune fille avant le début de l'activité sexuelle, c'est-à-dire avant l'exposition à l'infection par l'HPV.
Le vaccin peut être utilisé dès l'âge de 12 ans, voire si besoin à partir de 9 ans.
On peut également proposer la vaccination aux jeunes filles de moins de 23 ans qui n'ont pas eu de rapports, ou au plus tard dans l'année suivant le début de la vie sexuelle.
Mode d'administration
Les deux vaccins se présentent sous forme de suspension, à conserver entre 2 et 8° C et à injecter par voie intramusculaire.
Le vaccin tétravalent est administré à 0, 2 et 6 mois, avec un intervalle minimum de 4 semaines entre la première et la deuxième dose, et un intervalle minimum de 12 semaines entre la deuxième et la troisième dose.
Le vaccin bivalent est administré à 0, 1 et 6 mois.
Tolérance
La tolérance est bonne, les réactions observées étant essentiellement des réactions au site d'injection (érythème, douleur, gonflement) et des fièvres.
Contre-indication
Hypersensibilité à l'un des constituants du vaccin.
Efficacité
La durée d'efficacité du vaccin est d'au moins 5 ans. On manque actuellement de données sur la durée de protection conférée au-delà de ce délai. La nécessité de doses de rappel n'a pas été établie.
Rappelons que ces vaccins ne protègent pas contre les types d'HPV non contenus dans les vaccins, et qu'ils n'ont pas d'effet sur les infections préexis-tantes et leur évolution.
La vaccination ne dispense donc pas du dépistage systématique du cancer du col de l'utérus.
Vaccin | Types antigéniques | Protection | Schéma vaccinal | Voie d'injection | Conservation |
Tétravalent | 6, 11, 16, 18 | Lésions précancéreuses Cancers du col de l'utérus Condylomes ano-génitaux | 0, 2 et 6 mois avec intervalle minimum de 4 semaines entre la 1ère et la 2ème dose, et intervalle minimum de 12 semaines entre la 2ème et la 3ème dose | Intra-musculaire | Entre + 2° c et + 8° C |
Bivalent | 16, 18 | Lésions précancéreuses Cancers du col de l'utérus | 0, 1 et 6 mois | Intra-musculaire | Entre + 2° c et + 8° C |
Développement et Santé, n°195/196, 2009