Modes de transmission des hépatites virales

Par Amine  SI-ALI Médecin hygiéniste, Créteil, France

Publié le

Les hépatites sont des lésions inflammatoires du foie dont les causes peuvent être multiples : infectieuses, médicamenteuses, auto-immunes, etc. Les hépatites virales sont fréquentes, souvent asymptomatiques, liées soit à une action cytopathique directe du virus causal, soit plus souvent à la réaction immunitaire dirigée contre les cellules hépatiques infectées.

De nombreux virus sont capables d’entraîner occasionnellement des lésions hépatiques, en particulier le CMV, l’EBV, l’HSV, le virus de la fièvre jaune. Mais cinq virus, les virus des hépatites A, B, C, Delta et E (HAV, HBV, HCV, HDV, HEV), ont véritablement un tropisme hépatique quasi-exclusif et sont reconnus comme responsables de ce que l’on appelle communément « hépatites virales ».
Récemment, deux nouveaux virus, le virus dit de l’hépatite G (HGV ou GBV-C) et le TTV ont été incriminés comme agents d’hépatites. Mais leur rôle n’est pas démontré.

Les hépatites virales, bien que dues à des virus appartenant à des familles bien différentes, s’individualisent surtout par leur mode de transmission et leur évolution.

I. Hépatite A et hépatite E

Elles sont transmises par voie fécale-orale. Elles sont endémo-épidémiques dans les régions à bas niveau socio-économique où elles frappent surtout les enfants. En France, on assiste à une forte diminution de l’endémie à HAV et à un recul de l’age de l’hépatite.
L’hépatite E sévit principalement en Afrique, en Asie et au Mexique.

Mode de transmission de l’hépatite A

  • Par voie digestive (transmission féco-orale) : transmission par manuportage, à des personnes en contact étroit avec le cas (famille), ingestion d’aliments contaminés (par l’environnement, coquillages ou par manipulation par une personne contaminée) ou d’eau contaminée, plutôt dans les pays où l’hygiène est défectueuse.
  • Exceptionnellement transmission par voie sanguine (transfusion de produits sanguins contaminés, pas de cas par AES documenté).
  • Par voie sexuelle (pratiques oro-anales).

Population à risque d’hépatite A

Activités exposantes

  • Personnels travaillant dans des communautés infantiles : services de pédiatrie, crèches, garderies, écoles… et institutions pour handicapés.
  • Techniciens des laboratoires effectuant des examens de selles. Personnels effectuant des travaux au contact d’eaux usées (réseaux d’assainissement, stations d’épuration…).
  • Personnels de blanchisserie (manipulation de linge sale).

NB : les personnels en contact avec les aliments ne sont pas exposés au risque mais peuvent être à l’origine d’une contamination alimentaire s’ils sont porteurs ; d’où les recommandations d’hygiène et de vaccination anti-VHA des personnels impliqués dans la préparation alimentaire en restauration collective.

Terrain à risque accru d'acquisition

Voyageurs en zone endémique, homosexuels masculins et les jeunes handicapés vivant en internat.

Terrain à risque accru de forme grave

Porteurs de maladies chroniques du foie, immuno-dépression. La gravité augmente avec l’âge.

Grossesse

Les femmes enceintes n’ont pas un risque plus élevé de développer une hépatite A sévère. Chez la femme enceinte, il existe un risque d'accouchement prématuré au cours des deux derniers trimestres de grossesse (risque inconnu au 1er trimestre). De rares cas de transmission en période périnatale dans les deux semaines avant l'accouchement ont été documentés, mais habituellement l'hépatite A chez le nouveau-né est le plus souvent asymptomatique et bénigne. Il n'y a pas de contre-indication à l'allaitement d'un nouveau-né ou d'un enfant par une mère infectée par le VHA.

II. Hépatites B, C et Delta

Les virus sont transmis, avec des fréquences variables selon les virus, par voie parentérale, sexuelle et verticalement de mère à enfant.
Les hépatites B et C ont une distribution mondiale, plus ou moins superposables, avec des régions de forte endémie (Asie du Sud Est, Afrique intertropicale, Chine), des régions de moyenne endémie (Europe de l’Est, Amérique Centrale) et des régions de faible endémie (Europe du Nord et de l’Ouest, USA).
L’infection à HDV sévit, elle aussi, dans le monde entier, mais tout particulièrement dans le bassin méditerranéen, le Moyen-Orient et l’Afrique de l’ouest où jusqu’à 20% des personnes sont infectées par l'HDV.

Mode de transmission de l’hépatite B

  • A la suite d’un Accident Exposant au Sang (AES), après exposition professionnelle au VHB par piqûre, le taux de transmission varie de 2 % à 40 % en fonction de la présence ou non de l'Ag HBe. Le taux de transmission est environ 10 fois plus faible après exposition sur muqueuse ou sur peau lésée.
  • Par partage de matériel d'injection chez les usagers de drogues IV.
  • Par ailleurs, le VHB se transmet par voie sexuelle (taux de transmission de 30 % à 80 %) et la transmission materno-fœtale existe (entre 25 % et 90 % en fonction de la virémie chez la mère et en l'absence de séroconversion à la naissance).

Population à risque d’hépatite B

Activités exposantes

Personnels de santé et de laboratoires en contact avec des produits biologiques, transports de déchets d'activité de soins.

Terrain à risque accru d'acquisition

Usagers de drogues par voie injectable, hémodialysés...

Terrain à risque accru de forme grave

Alcoolisme, co-infection par le VHC et le VIH.

Grossesse

Risque de transmission materno-fœtale au moment de l'accouchement.

Mode de transmission de l’hépatite C

  • A la suite d’un accident d'exposition au sang (AES) : après exposition professionnelle au VHC par piqûre, le taux de transmission est estimé à environ 1 à 3 %. Le taux de transmission est environ 10 fois plus faible après exposition sur muqueuse ou sur peau lésée.
  • Par partage de matériel d'injection (seringue, cuiller, filtre, eau) chez les usagers de drogues IV. Il s'agit du mode de transmission majeur du VHC. L'usage de drogues par voie nasale (partage de la paille) ou par voie fumée (partage de la pipe à crack) est aussi une pratique à risque de transmission du VHC.
  • Les transmissions nosocomiales sont en nette diminution du fait de l'amélioration du respect des précautions standard.
  • La transmission sexuelle est extrêmement faible, et la transmission materno-fœtale n'existe que quand la mère est virémique et est estimée à 5 % en France (majorée en cas de co-infection VIH).

Population à risque d’hépatite C

Activités exposantes

Personnels de santé, personnels de laboratoires qui manipulent des prélèvements sanguins, personnes susceptibles d'être en contact avec des objets piquants ou tranchants, traînants, souillés par du sang.

Terrain à risque accru d'acquisition

Usagers de drogues par voie injectable, hémodialysés.

Terrain à risque accru de forme grave

Alcoolisme ; co-infections par le VHB ou le VIH, qui aggravent le risque de développer une cirrhose. Le portage chronique de l'Ag HBs pourrait favoriser la survenue d'une hépatite C aiguë fulminante.

Grossesse

  • Femme enceinte : pas de particularité.
  • Enfant à naître : risque de contamination faible.