Les vaccins : une solution miracle ?

Par Jean-Loup Rey, Médecin de santé publique, GISPE

Publié le

Constats

Les vaccins, ou plutôt les politiques vaccinales, comptent les plus beaux succès de la médecine préventive. L'exemple le plus marquant est celui de l'éradication de la variole grâce aux vaccinations de masse réalisées entre 1930 et 1970.
L'efficacité des vaccins est d'un niveau très élevé, cela est une certitude admise par tous, néanmoins elle n'est pas de 100 %.
La vaccination est l'innovation qui a le plus contribué à l'allongement de la durée de vie dans le monde et, à ce jour, 55 vaccins permettent de couvrir 26 maladies infectieuses.
Les succès des vaccinations sont en grande partie dus au dynamisme des organisations qui les ont accompagnées. Il s'agit davantage d'un effet du management des campagnes, de la vaccinologie (si la vaccinologie est définie comme tout ce qui entoure la vaccination) que des vaccins eux-mêmes.
Tous les succès contre les maladies ne sont pas dus aux vaccins. Même pour la tuberculose, contre laquelle il existe un vaccin, le BCG, la diminution des cas dans grand nombre de pays est aussi due à d'autres facteurs (hygiène, hausse du niveau de vie, traitements antituberculeux).

Première déduction

Pour aboutir à un effet communautaire de la vaccination (en dehors des rares échecs biologiques, le bénéfice individuel est certain), une bonne organisation de l'utilisation des vaccins est nécessaire, comme cela a été le cas pour l'éradication de la variole ou l'instauration du Programme Elargi de Vaccination (PEV). A contrario, on voit actuellement que, si la logistique et l'organisation du PEV sont défaillantes, les résultats en deviennent insuffisants.

Une politique vaccinale est fondée sur un rationnel clair

Choix de la population à vacciner (âge, sexe, fréquence...) en fonction de l'épidémiologie, de la maladie, du bénéfice individuel et collectif attendu.
La réussite d'une politique vaccinale passe par le respect des recommandations.

Deuxième déduction

Il n'est pas raisonnable de penser que la résolution de toute pathologie infectieuse puisse être obtenue par la vaccination.
Si l'on prend l'exemple du SIDA :

  • Même si un vaccin existait, était applicable et accessible, il ne serait certainement pas le seul outil qui ferait reculer l'épidémie.
  • Si ce vaccin existait, qui en bénéficierait nouveau-nés, adolescents, adultes à risque, à quelle fréquence devrait-il être administré, quels en seraient les risques, les effets induits ?

La qualité exceptionnelle des vaccins actuels a un effet pervers : elle incite à penser que la vaccination est la seule solution aux problèmes de santé ; on parle même de vaccins contre des maladies non infectieuses comme la maladie d'Alzheimer ou le diabète !

Au total

Le vaccin a une double nature, il est à la fois un médicament d'un point de vue réglementaire et un outil de prévention et de santé publique. Il est l'un des rares médicaments utilisés en prévention primaire, l'un des rares à être inoculé à des organismes sains et l'un des seuls traitements devenus, dans certains cas, obligatoires.
Il concerne des populations entières définies selon des critères de santé publique. Il cherche à éliminer une maladie à l'échelle communautaire et pas seulement à aider chaque patient à éviter une maladie.

Recommandations

Il faut expliquer le double intérêt du vaccin : pour soi-même (éviter de contracter la maladie ou au moins en diminuer la gravité) et pour la communauté : se vacciner c'est aussi protéger son entourage (effet altruiste).
Il existe un programme de vaccinations ; si les résultats apparaissent insuffisants, il faut tout faire pour les améliorer avant d'envisager d'ajouter d'autres antigènes vaccinaux.

Développement et Santé, n°195/196, 2009