Le virus de l'immunodéficience humaine ou VIH
Le virus de l' immunodéficience humaine ou VIH Par Jean-Marie Huraux Service de virologie du groupe hospitalier Pitié-Salpêtrière - Paris, France. Le VIH (HIV en anglais) est un virus dont le génome est sous forme d'acide ribonucléique (ARN ou RNA en anglais). Ce RNA est contenu dans une boîte protéique ou " capside ", elle-même entourée d'une enveloppe. Cette enveloppe vient de la membrane cytoplasmique de la cellule infectée et se présente, pour cette raison, sous forme d'une double couche lipidique. Toutefois, celle-ci est hérissée de spicules constitués de deux sortes de glycoprotéines, la gp120 et la gp41 (fig. 1). Ces glycoprotéines interviennent dans les premières phases de la multiplication du virus dans la cellule. C'est par la gp120 que le virus s'attache à la membrane cytoplasmique de la cellule qu'il va infecter, très précisément au niveau de deux structures d'origine cellulaire, la molécule CD4 et un corécepteur. Quant à la gp41, elle intervient pour fusionner le virus à la cellule. Ainsi, la capside virale contenant le RNA viral passe à l'intérieur du cytoplasme (fig. 2 - étape 1). Là, le RNA viral se trouve transcrit en acide désoxyribonucléique (ADN ou DNA) (f ig. 2 - étape 2 et fig. 3). Cette transcription de RNA en DNA est l'opération inverse de la transcription habituelle que sait faire la cellule (qui transcrit du DNA en RNA pour produire le RNA des ribosomes, les RNA messagers et les RNA de transfert). Cette transcription " inverse " exige une enzyme spéciale, virale, contenue dans la capside : la transcriptase inverse (TI) ou, en anglais, reverse transcriptase (RT). Le VIH appartient ainsi aux rétrovirus. Cette opération de transcription inverse est complexe et comporte de nombreuses erreurs qui conduisent à autant de mutations dans le génome viral. Celles-ci modifient les structures du VIH, les structures antigéniques cibles des défenses immunitaires antivirales et les enzymes cibles des antirétroviraux. Ce DNA viral va se refermer sur lui-même, se transporter au niveau du noyau de la cellule et s'insérer (s'intégrer) dans le DNA cellulaire, cela grâce à une deuxième enzyme virale : l'intégrase (fig. 2 - étape 3 et fig. 3). Ainsi, le génome viral va faire désormais partie du génome cellulaire, et y rester à l'abri tant que la cellule vivra, échappant aux défenses immunitaires comme aux traitements antirétroviraux. À partir du génome cellulaire, le génome viral intégré va fonctionner, à bien des égards, comme un gène cellulaire : il va être transcrit par la cellule elle-même en RNA viraux (f ig. 2 - étape 4), constituant, les uns de nouveaux génomes viraux, les autres des messagers viraux traduits en nouvelles protéines virales (protéines de capside, enzymes virales, glycoprotéines d'enveloppe gp120 et gp41) (fig. 2 - étape 5). L'assemblage de ces nouveaux composants viraux (RNA et protéines) va reconstituer une centaine de nouveaux virus. À cette étape, intervient une troisième enzyme virale, la protéase, nécessaire au découpage des protéines virales (fig. 2 - étape 6). Celles-ci sont en effet produites en blocs, sous forme de précurseurs géants, qu'il faut tronçonner (cliver). Il y a là une étape de " maturation ", nécessaire pour que les nouveaux virus, destinés à sortir de la cellule pour aller en infecter d'autres, soient doués de pouvoir infectieux (fig. 2 - étape 7). Ainsi, les médicaments antirétroviraux actuellement disponibles ou en expérimentation, visent l'une des quatre structures virales suivantes (fig.2 - encadrés 1 à 4) : la gp41 responsable de la fusion du virus à la cellule, la transcriptase inverse, responsable de la transcription du RNA viral en DNA viral, l'intégrase responsable de l'intégration du DNA viral dans le génome cellulaire, et la protéase responsable du clivage des protéines virales en fin de cycle. Pour être efficaces, les traitements antirétroviraux vont devoir surmonter, parmi divers obstacles, deux d'ordre virologique : 1. les mutations sur les cibles des antirétroviraux, conduisant à la résistance aux médicaments correspondants, et obligeant à modifier la composition du traitement ; la fréquence de ces mutations de résistance se trouve réduite par l'utilisation des antirétroviraux en associations ; Figure 1 : structure du VIH ou HIV Guérir jamais Soulager beaucoup Consoler toujours D'après Ambroise Paré, XVI ème siécle. 2. l'intégration du génome viral dans le génome cellulaire, d'où il ne peut être éliminé, de sorte que tout arrêt du traitement le retrouve intact et entraîne inévitablement une reprise de la multiplication virale. D'où l'importance d'une prise des antirétroviraux régulière et à doses efficaces, c'est-à-dire d'une bonne observance. Figure 2 : multiplication du VIH/HIV-1 dans la cellule FIGURE 3 : Le VIH est un rétrovirus LE VIH, EN BREF Comme tous les virus, le VIH, pour se reproduire (réplication) doit impérativement parasiter une cellule, ici les lymphocytes T CD4. On distingue quatre temps principaux : 1. Pénétration dans la cellule, après fusion avec la membrane cellulaire (protéine gp 120). 2. Transformation du VIH ARN en VIH ADN grâce à une enzyme (copieuse), la REVERSE TRANSCRIPTASE. 3. Intégration du VIH ADN dans l'ADN du lymphocyte. 4. L' ADN du lymphocyte se trompe et fabrique des protéines virales c'est adire du VIH (rôle++ d'une enzyme : PROTEASE). Excrétion par la cellule de nouveaux virus VIH. Développement et Santé, n°168, décembre 2003