Le traitement diététique du diabète sucré de l'enfant

Par 0. Wembonyama Professeur de Pédiatrie, Université de Mbujimayi, Zaïre.

Publié le

Le traitement du diabète sucré de l'enfant repose sur l'association de l'insulinothérapie, de l'alimentation adaptée, de l'exercice physique et du soutien psychologique. La réussite d'un tel traitement exige une éducation minutieuse de l'enfant et de sa famille par l'équipe soignante : expliquer en termes simples la motivation thérapeutique, apprendre à faire des injections d'insuline, à surveiller la glycémie et son régime alimentaire, enseigner la façon d'adapter le traitement à la vie quotidienne, faciliter son acceptabilité et encourager sa régularité.

I. Principes thérapeutiques

L'objectif du traitement est d'obtenir une correction adéquate de la glycémie, permettant à l'enfant et à l'adolescent diabétiques une croissance et une puberté normales, de prévenir les complications aiguës, telles l'acidocetose et l'hypoglycémie et de repousser au maximum les complications chroniques oculaires, rénales et neurologiques, tout en lui permettant de mener une vie aussi normale que possible tant sur le plan physique et scolaire, que psychologique.

II. Alimentation

L'alimentation de l'enfant diabétique est proche de celle de l'enfant normal en calories et en composition. Elle doit être suffisante pour l'âge et doit assurer une croissance staturo-pondérale et un développement sexuel normaux.

L'apport conseillé est de 50 à 55 % de calories sous forme de glucides, de préférence des sucres à absorption lente, 15 % sous forme de protides et 30 à 35 % sous forme de lipides avec un rapport de graisses insaturées (d'origine végétale)/graisses saturées (d'origine animale) supérieur à 1. Ce régime pauvre en graisses saturées (qui représentent ainsi moins de 10 % de la ration calorique) permet de minimiser le risque d'athérome.

En Afrique ce régime perturbe les habitudes de la famille. Il est en outre difficilement réalisable dans ces conditions en raison de la pauvreté, de la non-disponibilité de certains aliments présentés à des prix exorbitants, des habitudes et tabous alimentaires qui ne prédisposent pas aux changements et du nombre insuffisant de diététiciennes.

III. Régime alimentaire

Le régime alimentaire de l'enfant en Afrique est loin de ressembler à celui d'un enfant en Occident. Les glucides dont la nature dépend de la région et de la tribu constituent l'apport principal de calories. En général, le même type de glucides est consommé tout au long de l'année. Les protéines, surtout celles d'origine animale, sont de préférence réservées aux adultes. Les graisses d'origine végétale apportent l'essentiel des calories fournies par les lipides.

La régularité et la distribution des repas au cours de la journée dépend fortement de la disponibilité alimentaire, des rythmes de travail, de la situation socio-économique, des habitudes et coutumes. Ainsi il n'est pas rare de rencontrer dans de nombreuses familles le rythme d'un seul repas par jour.

IV. Principes généraux

Malgré ces difficultés, les principes d'une bonne alimentation sont importants à connaître et seront adaptés selon les circonstances, les milieux et la situation socio-économique des parents. On insiste sur :

  • la régularité des repas et de leur distribution au cours de la journée qui doit s'adapter

à la cinétique de l'insuline utilisée. Le nombre optimal des repas est estimé à six : trois repas principaux et trois collations (à 10 h, 15-16 h, et avant le coucher, éventuellement) ;

  • les sucres à absorption digestive rapide (miel, confiseries, sucreries, confitures, boissons et jus de fruits sucrés) sont à réduire fortement sauf en cas d'hypoglycémie ;

  • les sucres à absorption lente (riz, pommes de terre, pâtes, légumes secs, pain, ignames, bananes plantains, manioc, maïs ... ) seront répartis entre le déjeuner (17 %), le dîner (27 %), le goûter (12 %), le souper (24 %) et les deux collations (10 % chacune, de façon à éviter de fortes hypoglycémies post-prandiales ;

  • un régime hypocalorique sera prescrit chez l'enfant obèse ;

  • l'usage de saccharine ou d'aspartame est recommandé de façon modérée ;

  • l'utilisation de fibres (cellulose, pectine... afin de ralentir l'absorption des sucres, n'est pas préconisée chez l'enfant et l'adolescent.

V. Diététique des hypoglycémies

Les hypoglycémies peuvent être dues à une erreur de dose d'insuline, à un décalage de repas ou d'un exercice physique intense effectué sans les précautions nécessaires.

Les signes mineurs doivent être bien connus de la famille, afin de prendre immédiatement les mesures adéquates : administration de 10 à 15 g de sucres rapides associés à des sucres lents. La prévention de l'hypoglycémie nocturne peut être obtenue par une collation prise avant l'endormissement.

VI. Comment aborder le problème

Les équipes saignantes doivent prendre conscience de la réalité du diabète sucré chez l'enfant et développer des réflexes de dépistage et de soins.

Il faudra fournir des efforts pour former le personnel de santé en matière de nutrition de l'enfant diabétique.

Par une éducation sanitaire et nutritionnelle minutieuse et adaptée, les enfants diabétiques et leurs familles seront amenés à améliorer les régimes alimentaires, à combattre les tabous et interdits alimentaires néfastes, à élargir l'alimentation au-delà de ce qui est consommé dans la région ou la tribu.

Il est nécessaire d'intégrer la prise en charge des diabétiques dans les programmes de médecine communautaire.

Conclusion

Le traitement diététique sucré de l'enfant, en apparence simple, est de réalisation difficile en Afrique. Les habitudes alimentaires, la non-disponibilité de certains aliments, l'insuffisance d'instruction des parents et les difficultés socio-économiques sont quelques-unes des raisons qui compliquent la prise en charge des enfants. La connaissance de la pathologie, l'éducation des familles et l'amélioration des conditions de vie peuvent permettre un abord adéquat de la maladie.

Développement et Santé, n°125, octobre 1996