Le bon usage des gants en milieu de soins

Par Amine Si-Ali Médecin hygiéniste, Créteil, France

Publié le

Les gants à usage unique sont souvent nécessaires dans l’exercice des soins à l’hôpital, et le respect des règles de leur bon usage est indispensable.
Il faut bien distinguer les gants stériles destinés en priorité à protéger le patient et les gants non stériles qui protègent le soignant.

Nous envisagerons ici les catégories, indications et règles générales concernant les gants, puis l’intérêt des gants stériles et enfin le cas de l’allergie au latex.

I. Les catégories de gants

1. Les gants non stériles comprennent

  • Les gants dits de soin non stériles, pour protéger ses mains d’un contact non invasif avec du sang ou un liquide biologique tel que la salive ou des matières fécales.
  • Les gants dits de protection, pour les protéger d’un produit chimique, comme un désinfectant, un détergent-désinfectant ou encore un médicament anticancéreux. Ces derniers comportent en outre une manchette pour mieux protéger les poignets de l’opérateur.

2. Les gants stériles comprennent

  • Les gants dits de soin stériles, pour les soins, généralement invasifs, qui ont une exigence d’asepsie, comme un sondage urinaire, un cathéter vasculaire, etc.
  • Les gants dits d’intervention, pour les interventions de courte durée, comme une suture chirurgicale.

3. En fonction de leur composition, on distingue

  • Les gants en latex naturel, dont l’élasticité et la résistance sont remarquables.
  • Les gants en caoutchouc synthétique hypo-allergénique, tel que le néoprène ou le polyuréthane.
  • Les gants en polymère thermoplastique, peu coûteux, mais sans élasticité ni grande résistance, tel que le polychlorure de vinyle ou le polyéthylène de haute densité.

II. Indications

La sécurité apportée par les gants concerne le risque de contact infectant, mais aussi celui de piqûre infectante. En effet, lorsque l’on se pique accidentellement avec une aiguille creuse chargée de sang, on a pu montrer que l’interposition d’une couche de gant réduisait le volume de sang ainsi inoculé.
Le port de gants est en pratique indiqué pour prévenir tout contact des mains du soignant avec du sang, un liquide biologique (salive, sécrétions respiratoires, urines, matières fécales), une muqueuse ou encore une zone de peau lésée. Et cela dans le cadre des précautions dites standard, détaillées dans la circulaire du 20 avril 1998. Cette recommandation concerne donc les soins comportant un tel risque, en particulier ceux qui comprennent une ponction, une injection ou tout autre geste invasif, ainsi que la manipulation d’échantillons de prélèvement biologique (tube de sang, flacon d’urines…), de linges souillés ou encore de dispositifs médicaux utilisés.

D’une façon générale, chaque fois que l’on examine ou soigne un patient, il faut se poser cette question : "Mes mains risquent-elles d’entrer en contact avec du sang ou un liquide biologique ?" et mettre des gants si c’est effectivement le cas.

Mais les indications du port de gants ne se limitent pas au seul risque infectieux : en effet, ils servent également à prévenir un contact des mains du soignant avec un produit caustique ou toxique, cela dans le cadre des mesures de protection de l’épiderme vis-à-vis des agressions chimiques, par l’utilisation de gants dits de protection.

En revanche, il n’est pas recommandé de porter des gants pour un contact avec une peau saine, sauf dans le cas où les mains du soignant comportent des lésions à type de blessure, même minime comme une excoriation, de brûlure ou de dermatose.

III. Les règles générales

Le port de gants ne remplace pas l’hygiène des mains : il la complète.
Qu’ils soient ou non stériles, les gants non poudrés doivent être privilégiés, car ils sont moins irritants et moins sensibilisants que les gants poudrés avec de l’amidon de maïs.
Les mains doivent être au préalable lavées et séchées, sans bague ni bracelet, et avec les ongles coupés à ras.

Les gants sont enfilés juste avant le contact ou le soin, et sont retirés dès la fin du contact ou du soin, pour être jetés, et cela avant de toucher une quelconque zone de l’environnement. En effet, attention à ne pas répondre au téléphone, manœuvrer une poignée de porte, un interrupteur, toucher une table, un clavier, une commande ou tout autre élément environnemental avec des gants contaminés.

Bien entendu, les gants sont impérativement changés entre deux patients ou deux activités y compris chez le même patient.
Après le retrait des gants, un geste d’hygiène des mains est nécessaire, car ils ne sont pas une barrière absolue
et de plus il se produit sous le gant une importante prolifération microbienne par un phénomène de macération.

IV. L’intérêt des gants stériles

Certains gestes, généralement invasifs, nécessitent l’usage de gants stériles, en raison d’une exigence d’asepsie. La pose d’un cathéter veineux central ou d’une aiguille pour dispositif intraveineux implantable, une infiltration intra-articulaire, une suture chirurgicale ou encore un sondage urinaire en sont quelques exemples.

Les gants stériles sont la seule mesure capable d’apporter une asepsie maximale.
En effet, le lavage ou la désinfection des mains par friction avec un produit hydro-alcoolique ne produisent qu’une réduction de la flore microbienne et non son éradication permanente.
Par ailleurs, il est parfois utile, pour certains soins, lorsque l’on travaille seul comme c’est souvent le cas en cabinet médical ou à domicile (malades avec chambre implantable), de n’enfiler, au moins en début de soin, qu’un seul gant stérile, de façon à avoir une main aseptique et l’autre non. En effet, avec un gant stérile, il ne faut en principe toucher que des éléments aseptiques.

V. Le cas de l’allergie au latex

L’allergie vraie au latex est fréquente chez les professionnels de santé. Elle doit être bien distinguée de la simple dermite irritative, liée bien souvent au non-respect des règles générales du port des gants ou à l’utilisation de gants fortement poudrés.

1. L’allergie immédiate ou hypersensibilité de type I

Elle se manifeste par des lésions d’urticaire. Elle est liée aux protéines sensibilisantes du latex et en contre-sindique l’usage, dès l’instant où elle est reconnue. Elle peut ne pas se limiter aux mains et parfois être sévère avec des manifestations respiratoires, voire systémiques. Attention, elle est également susceptible de concerner le patient.

2. L’allergie retardée ou hypersensibilité de type IV

Elle se traduit par des lésions d’eczéma, apparaissant au minimum après une demi-journée. Elle est liée aux additifs chimiques utilisés pour la fabrication du caoutchouc à partir du latex brut.

En conclusion

Les gants sont une protection, une deuxième peau ; mais attention à bien respecter les règles de leur utilisation, de façon à bénéficier de toute leur sécurité.

Bibliographie:

  1. Gants de protection pour les métiers de la santé. Institut National de Recherche et de Sécurité (INRS). Travail et sécurité, fiches pratiques de sécurité (ED 118) : 1-4, 2004, Paris
  2. Surveiller et prévenir les infections associées aux soins Société Française d'Hygiène Hospitalière, Ministère de la Santé et des Sports, Haut Conseil de la santé publique Hygiènes, 2010 - 18-28, 62-3, 69-75
  3. Allergie au latex naturel - Prévention primaire et secondaire en milieu de travail. E. Virey-Griffaton, MP. Lehucher-Michel, D. Vervloet. La Presse Médicale, 2000 - 29 (5) : 257-62