La prévention des asthmes allergiques

Par Martine Hervé-Guillot, Sophie Lemerle * Hôpital Intercommunal de Créteil.

Publié le

L'asthme, dans la majorité des cas, est d'origine allergique.

I. Qu'est-ce que l'allergie ?

L'allergie est une réaction excessive de notre organisme vis-à-vis de substances qu'il considère comme nocives alors qu'elles ne le sont pas.

Normalement, notre système immunitaire a pour fonction de nous défendre contre toute invasion de substances étrangères. Dans certains cas, ce système immunitaire dépasse son objectif et en fait trop : le système est déréglé ; il réagit même si l'étranger n'est pas menaçant ou dangereux. Ce dérèglement du système immunitaire provoque des réactions exagérées et nocives qui sont appelées " hypersensibilité " ou " allergie ". Se sensibiliser veut dire que le système immunitaire a été en contact avec un antigène. S'il s'en souvient, c'est qu'il a fabriqué des anticorps spécifiques contre lui. Ultérieurement, il reconnaîtra l'antigène et réagira.

Les personnes allergiques ont une prédisposition héréditaire à fabriquer des anticorps de la classe des IgE (immunoglobuline E).

II. Les causes principales d'allergie respiratoire responsable d'asthme

1. L'allergie à la poussière de maison

Le contenu de la poussière domestique est variable en fonction de la situation, du type de l'habitat, du climat, de l'altitude et de la saison. La poussière de maison constitue un réservoir complexe d'allergènes.

a. Les acariens

Ce sont eux qui dominent parmi les allergènes. Il s'agit de petites araignées qui mesurent 0,3 mm. Certains acariens se nourrissent de squames humaines (ou pellicules de peau usée). Ils vivent dans la literie (oreillers, matelas, édredons) et c'est là que la peau frotte sur les draps. Mais pour survivre, les acariens ont aussi besoin d'un champignon microscopique: les moisissures qui poussent surtout sur les matelas.

Par gramme de poussière récoltée sur les matelas, on a dénombré 2 000 à 15 000 acariens !

Au niveau d'un matelas occupé par un dormeur, la température élevée et l'humidité dégagée par le corps humain sont idéales pour le développement de ces acariens. Il faut donc, pour prévenir l'allergie, aérer le lit correctement chaque jour d'autant plus qu'il fait chaud et humide. Il ne faut pas oublier de battre les oreillers et le matelas quand on le peut. Par contre, en altitude, les acariens les plus souvent responsables d'allergie sont absents. C'est l'une des raisons pour lesquelles le climat d'altitude convient aux allergiques.

Faire disparaître l'allergène (ou éviction) est la mesure par excellence pour supprimer ou diminuer l'allergie aux acariens.

Pour obtenir une chambre à coucher ou une habitation sans poussière, il faut agir sur tous les matériaux susceptibles d'héberger les acariens :

  • laver les draps une fois par semaine à forte température,
  • remplacer la laine, le kapok, le coton et le crin, les plumes du matériel de literie par des matières synthétiques (mousse, latex, polyester, dacron),
  • préférer les rideaux en matières synthétiques. Supprimer le duvet (les oreillers en plume),
  • supprimer les tapis épais et les peaux d'animaux décoratifs,
  • supprimer les tapis et les moquettes,
  • supprimer les coussins non synthétiques,
  • utiliser souvent l'aspirateur en l'absence de la personne allergique,
  • supprimer les plantes vertes (réservoirs à moisissures).

b. Les moisissures

Ce sont des champignons filamenteux qui produisent des spores. Les spores sont les agents responsables de manifestations allergiques respiratoires. On les trouve dans la nature (matière en décomposition, air, et aussi dans les habitations).
Comme pour les pollens, la concentration atmosphérique des moisissures dépend des conditions climatiques et est particulièrement élevée dans les zones de grande humidité.

Pour éviter les moisissures dans la maison, il faut :

  • aérer le plus possible, notamment les pièces spécialement confinées (salles d'eau, cuisine),
  • nettoyer et désinfecter les circuits de conditionnement d'air (entreprises d'entretien des immeubles),
  • ne surtout pas laisser traîner des aliments moisis,
  • se méfier des bacs à fleurs,
  • se méfier des papiers peints qui sont un endroit privilégié derrière lesquels se cachent les moisissures,
  • éviter de se promener sous la pluie,
  • éviter de ramasser des paquets de feuilles mortes amassées depuis plusieurs jours.

2. L'allergie aux animaux

Ce type d'allergie est très fréquent et peut aggraver les manifestations d'autres allergies.

Les allergènes ne se trouvent pas seulement dans les poils des animaux mais:

  • dans la salive pour le chat, le chien, le cheval,
  • dans les urines pour le chat et le chien,
  • dans les squames (débris de peaux mortes), et
  • dans les excréments (perruches, pigeons).

Le chat, qui passe sa vie à se lécher, dépose beaucoup de salive sur ses poils qui sera disséminée un peu partout.

Quand on est allergique à un chien, on l'est quelles que soient la longueur de ses poils ou sa race.

Quant aux oiseaux, on est souvent allergique à eux par l'intermédiaire de leurs excréments.

La plupart des personnes se sensibilisent au contact de leur propre animal. Ainsi, pour éviter le développement de nombreuses allergies chez les enfants, il est déconseillé d'élever des animaux dans les écoles, malheureusement!

La prévention de l'allergie aux animaux consiste à écarter l'animal lorsque l'on connaît l'animal responsable. Ceci n'est pas toujours évident.

Malgré l'éviction de l'animal responsable, les crises peuvent durer encore plusieurs mois après.

3. Les pollens

Ce sont des allergènes importants dans le déclenchement de l'asthme. Ce sont de petits grains invisibles de 5/100 de mm. Les pollens sont dispersés par le vent et/ou transportés par les insectes.

Parmi les familles végétales responsables de pollinoses, on trouve des graminées, des arbres et des herbacées.

Pour éviter une crise d'asthme provoquée par les pollens, il faut connaître la date du pic pollinique dans la région d'habitation du patient et lui conseiller de ne pas se promener à cette période dans la région concernée.

Enfin, couper l'herbe, pour quelqu'un d'allergique aux pollens de graminées, c'est prendre un risque.

4. Les allergies alimentaires

Elles donnent volontiers des symptômes de type digestif mais aussi de type respiratoire ou cutané.

Les principales allergies alimentaires sont:

  • Le lait de vache justifiant l'allaitement maternel le plus longtemps possible. Quelquefois, pourtant, un enfant au sein peut présenter une allergie: la mère aura fait une grande consommation de lait de vache durant sa grossesse. Les protéines du lait de vache seront passées vers le fœtus à travers le placenta et l'auront sensibilisé. Pourtant, le lait maternel reste le meilleur aliment du nourrisson diminuant considérablement les allergies au lait de vache.

  • Les allergies au blanc d'œuf cru sont plus rares, entraînant plus des urticaires que des crises d'asthme de même que les allergies aux poissons, aux crustacés et aux mollusques.

  • Les allergies aux fruits exotiques ne sont pas rares: kiwi, avocat, banane....

  • Enfin, on voit apparaître de plus en plus chez l'enfant des allergies à l'arachide présente dans l'huile mais surtout dans les cacahuètes et dans de nombreuses conserves.

  • Il existe des allergies associées: une allergie à certains fruits et légumes est en effet associée à une allergie aux pollens.

  • Il faut savoir tout de même que la tolérance aux aliments s'améliore avec la croissance.

III. D'autres facteurs aggravent l'asthme

1. Le tabac

Lorsque les parent fument, l'enfant respire un aérosol tabagique extrêmement irritant pour ses muqueuses. Pourtant, le tabac en lui-même est très peu allergénique.

C'est la fumée qui entraîne des lésions de l'épithélium respiratoire et une augmentation de la perméabilité de cette muqueuse aux allergènes.

Les nourrissons sont les plus exposés et le tabagisme passif aggrave les viroses respiratoires.

La réactivité bronchique des enfants exposés au tabac est augmentée (même pendant la grossesse).

2. Les polluants de l'air

Ils semblent aggraver aussi l'asthme.

Il s'agit, d'une part, de la pollution industrielle; d'autre part, de la pollution liée à la circulation automobile (grandes agglomérations), enfin de toute fumée (feu de bois, cuisine, etc ... )

3. Autres facteurs

D'autres facteurs non spécifiques irritants aggravent l'asthme: poussière de craie, laine de verre, gaz irritant (laque pour cheveux).

L'effort et l'émotion peuvent aussi déclencher une crise.

Conclusion

Le traitement de l'allergie repose sur l'éviction. Pour la pratiquer, il faut l'avoir diagnostiquée !

Souvent, on peut arriver à réduire la quantité d'allergènes mais pas toujours la supprimer.

Dès la naissance, on peut prendre les précautions suivantes :

  • nourrir le bébé au sein le plus longtemps possible,
  • éviter les dérivés du lait de vache jusqu'à l'âge d'un an,
  • introduire les nouveaux aliments en petites quantités et un seul à la fois,
  • aérer chaque jour,
  • ne pas fumer en présence de l'enfant.

Développement et Santé, n°114, décembre 1994