L'ongle incarné
I. Causes
Elles regroupent en général :
- Ongle : anomalie de la courbure de la plaque unguéale (tuile de provence, volute, plicature, mauvaise coupe de l'ongle)
- Bourrelets et sillons : hypertrophie d'un ou des deux bourrelets qui s'empalent sur l'ongle et fragilité du sillon péri-unguéal.
- Troubles statiques du pied : déviations d'orteils (ex. hallux associé à une rotation externe du gros orteil qui entraîne un problème dans le sillon interne du gros orteil).
- Pied valgus important avec surcharge du bord interne qui entraîne un hyper-appui du bord interne du gros orteil.
- Traumatique : Choc sur la plaque unguéale avec possibilités d'esquilles.
II. Clinique
L'ongle incarné peut toucher tous les orteils mais siège surtout sur le gros orteil, il peut concerner un seul ou les deux sillons. On le rencontre souvent chez l'adolescent et l'adulte jeune.
Il existe 3 stades :
- Stade initial. Pas d'infection ni inflammation. Douleur réveillée par le chaussage.
- Onyxis incipiens. Douloureux avec bourrelet inflammatoire.
- Perionyxis. Ongle incarné infecté. Douleur permanente. Hypertrophie du bourrelet pouvant coiffer une partie de l'ongle.
III. Traitement médical
Lorsqu'il n'y a pas d'infection, pas de bourrelet, des soins locaux peuvent suffire : coupe adéquate, limage de l'ongle, soulèvement de ses angles par des coins de coton.
Plus le bourrelet est inflammatoire, plus l'accès est difficile, plus c'est hyperalgique.
Dans certains cas, on peut utiliser du nitrate d'argent pour diminuer le bourrelet. Il arrive que le traitement médical ne suffise pas. Dans ce cas, on fait appel à la chirurgie.
IV. Traitement chirurgical
L'opération consiste à retirer, non seulement le bord de l'ongle (ou les bords si les deux sont incarnés), mais aussi la matrice sous-jacente. Cette matrice est un tissu épais qui repose directement sur l'os, se prolonge sous la lunule, c'est-à-dire au-delà de l'ongle visible. C'est elle qui produit l'ongle, et une récidive surviendra aussi longtemps qu'elle n'aura pas été retirée.
Technique chirurgicale
Il s'agit d'une excision profonde et assez large, souvent sur une lésion infectée. La plaie n'est pas refermée, ses berges peuvent, au mieux, être rapprochées par un point de suture pour accélérer la cicatrisation. Des soins quotidiens dispensés par un infirmier ou une infirmière, et non pas par l'opéré ou son entourage, seront nécessaires pendant 15 à 25 jours. Si un point de suture a été placé, il faudra le retirer vers le 10e jour .
La douleur est souvent assez nette les premiers jours, justifiant la prise d'antalgiques. Des antibiotiques ne sont pas systématiques, sauf en cas d'infections. Le premier jour le pansement peut être souillé de sang. Aucune hémorragie grave ne peut cependant survenir. A long terme, les récidives sont rares, mais peuvent survenir ( moins de 5% des cas ) du fait de la persistance locale de minuscules flots de matrice progressivement développés.
En pratique
Si l'opération est faite sous anesthésie locale, la sortie du patient peut se faire juste après l'opération. Sous anesthésie générale, une hospitalisation de jour est habituellement suffisante. Des chaussures très larges seront utiles car une bande compressive, assez volumineuse, enserrera le doigt à la fin de l'opération. Elle ne sera plus utile le lendemain.
Si une hémorragie se produit, surélever le pied, comprimer directement le pansement avec les doigts, ou resserrer la bande.
Pendant trois jours, ne pas trop marcher ni rester debout, surélever le pied afin d'éviter un oedème du pied qui retarderait la cicatrisation et favoriserait l'infection. L'activité sera reprise progressivement.
La cicatrisation se fera vers le 15e/21e jour.
Nous ne voyons guère de catastrophes succédant au traitement inadéquat des ongles incarnés mais il faut avoir vu ces malheureux patients ayant subi d'abord l'ablation de l'ongle (qui aggrave les troubles lors de la repousse) puis l'ablation de la matrice (toujours incomplète avec repousse de cornes) pour comprendre le mal que peut faire un acte chirurgical illogique.
Développement et Santé, n° 153, juin 2001