Eczema chez l'enfant : conseils aux parents
I. Reconnaître une poussée d'eczéma
et une surinfection : bref rappel
Le soignant aura à expliquer à la famille qu'il s'agit de lésions érythémato-vésiculeuses parfois suintantes, parfois sèches, parfois prurigineuses. La maladie apparait assez tôt, vers trois mois, évolue par poussées et peut s'atténuer vers deux ans. Les causes sont souvent allergiques. Il est possible qu'un facteur psychologique (colère, tensions familiales, erreurs de prise en charge du bébé) intervienne dans la survenue d'une poussée.
Reconnaître une surinfection bactérienne lorsque l'eczéma devient plus suintant, douloureux à la palpation et s'accompagnant d'adénopathies douloureuses, et souvent de fièvre, on doit craindre une surinfection fréquemment à staphylocoques ou streptocoques. Un traitement antibiotique adapté s'impose.
II. Expliquer les principes du traitement
Trois sous-objectifs :
- dépister une cause allergique et l'écarter,
- reconnaître un facteur psychologique,
- savoir quoi utiliser selon l'aspect et l'intensité des lésions.
1. Dépister une cause allergique et l'écarter
Souvent on ne découvrira rien, mais on veillera à effectuer une recherche sur quelques éléments, d'autant plus que les parents vont eux-mêmes les suspecter.
Causes alimentaires
Citons en particulier
- les protéines du lait de vache : il existe des allergies révélées par un eczéma,
- les autres causes sont multiples, tant il s'agit d'une sensibilité individuelle.
La démarche diagnostique est toujours la même:
- est-ce que l'eczéma est survenu après l'introduction ou la prise d'un aliment ?
- est-ce que, lorsque l'enfant n'a pas pris cet aliment, l'eczéma s'est calmé ?
- est-ce qu'il a recommencé à la reprise de cet aliment ?
- pour l'allergie aux protéines du lait de vache, est-ce que l'eczéma est apparu quelques jours après la prise de lait de vache sous quelque forme que ce soit (cuiller, tasse, biberon) ?
- est-ce que lors de la remise au sein exclusive, l'eczéma s'est calmé ?
Causes médicamenteuses
N'importe quel médicament peut causer une allergie chez un enfant. Citons, pour leur fréquence et leur gravité, toutes les pénicillines et tous les sulfamides.
Animaux domestiques
Chats, chiens, oiseaux
Les causes sont multiples, la recherche étiologique est souvent décevante, mais elle mérite d'être entreprise. L'éviction d'un allergène reconnu à l'interrogatoire, règlera le problème, même si cela n'est pas facile.
2. Reconnaître un facteur psychologique
Parfois les parents s'aperçoivent que la poussée d'eczéma est contemporaine d'une grosse colère infantile ou d'agitation et de nervosité. Quelquefois, on découvrira que les parents ont des problèmes, des tracas, des soucis. Le fait de les aider à en parler, à s'exprimer, qu'ils se sentent reconnus et surtout écoutés est parfois contemporain d'une atténuation des poussées, comme si le bébé était le miroir des tensions parentales, et sans, bien sûr, que l'on puisse affirmer une relation de cause à effet.
3. Expliquer le traitement
Calmer le prurit par des sirops antihistaminiques (Polaramine®, Primalan, Clarityne®, etc.).
Assurer une hygiène parfaite et prévenir les surinfections :
- bien laver l'enfant avec de préférence un savon dit surgras et le sécher,
- couper et nettoyer les ongles à cause du prurit,
- désinfecter avec un colorant : éosine acqueuse, violet de gentiane, bleu de méthylène, etc., ou un antiseptique non colorant (Héxomédine® transcutanée),
- éviter tout contact avec une personne atteinte d'herpès, afin d'éviter la très redoutable surinfection du syndrome de Kaposi Juliusberg.
Utiliser des pommades, crèmes et onguents :
Il nous parait essentiel de faire la différence entre les dermocorticoïdes d'une part, et les crèmes hydratantes, cicatrisantes, protectrices, etc., d'autre part.
Les dermocorticoïdes
Il faut expliquer aux parents que ce sont des médicaments très efficaces qui calment les démangeaisons et l'éruption mais qu'ils ont deux gros inconvénients :
- ils traversent la peau très fine du bébé et risquent par là de réaliser une corticothérapie à long terme, du fait de l'usage répété du produit et risque théorique de retard de croissance,
- ils peuvent induire une corticodépendance, avec une reprise de l'eczéma à l'arrêt de l'application.
C'est pourquoi il faut expliquer aux parents qu'ils ne doivent les utiliser que :
- si nécessaire et indispensable : forte poussée suintante, très prurigineuse,
- le moins possible, juste ce qui est nécessaire,
- deux fois par jour et dès que cela s'améliore, ne pas arrêter brusquement, mais appliquer le produit une fois par jour pendant quelques jours ; ou alors utiliser en relais un dermocorticoïde moins fort (classe III ou IV).
En cas d'eczéma localisé, ils peuvent aussi pratiquer un pansement occlusif avec une compresse recouvrante pendant la nuit : cela permet de réduire la dose de dermocorticoïdes.
Les autres topiques cutanés :
En premier, les pâtes à l'eau (Aloplastine® qui limitent la sécheresse de la peau).
Les crèmes hydratantes.
Les cicatrisants et protecteurs (Bépanthène®, Oxyplastine®, Mitosyle, etc.).
Tous ces topiques sont à utiliser largement quel que soit le degré de la poussée.
Informer, expliquer ces différents messages, en discuter avec les parents demande du temps. Le soignant aura peut-être à les reprendre sur plusieurs consultations. Cela est pourtant nécessaire car la participation des parents conditionne la bonne prise en charge de l'affection ; en particulier, ils doivent bien comprendre et utiliser les dermocorticoïdes.
Le traitement de l'eczéma d'un enfant par les parents nécessite une information et une formation de ceux-ci à l'usage des différents produits. Ils auront à savoir reconnaître une poussée d'eczéma, à dépister une éventuelle cause allergique et à l'écarter, à reconnaître un facteur psychologique et à savoir comment utiliser les diverses pommades. En particulier, comment et quand utiliser les dermocorticoïdes. Pour parvenir à cette collaboration entre les parents, l'enfant et le soignant, un dialogue sera à instaurer.
Développement et Santé, n° 133, février 1998