Crise d'asthme de l'enfant
I. Reconnaître la crise
1. Chez le grand enfant
La crise ressemble à celle de l'adulte. C'est une gêne respiratoire qualifiée de bradypnée expiratoire :
En pleine nuit le plus souvent, l'enfant est assis, angoissé, sur son lit ; l'air a du mal à sortir de ses poumons, la respiration est lente, difficile, sifflante. La toux ramène difficilement des crachats épais et clairs. Le thorax est gonflé.
A l'auscultation, on entend des râles sibilants (sifflants) et parfois déjà quelques râles humides, témoins de l'encombrement des bronches.
Le diagnostic est très facile si l'enfant est connu comme asthmatique ; il connaît sa maladie et sait parfois déjà ce qu'il faut faire. Si l'asthme n'est pas connu, il faut bien analyser les signes et ne pas confondre avec une toux d'irritation et se contenter de donner un sirop antitussif. L'auscultation est, là, essentielle.
Une forme de crise facile à reconnaître est l'asthme d'effort, déclenché par un effort sportif ou physique, et qu'il faut traiter puis prévenir afin qu'elle ne se reproduise pas à chaque effort.
2. Chez le nourrisson
Il s'agit surtout de sifflements respiratoires, à l'expiration. Le plus souvent, c'est une sorte de bronchite sifflante qui survient chez un bébé enrhumé et tousseur depuis quelques jours. La respiration devient plus rapide, avec un frein au temps expiratoire.
A l'auscultation, on entend des râles sibilants et des râles humides d'encombrement bronchique. Cela ressemble à une "bronchiolite" virale, volontiers fébrile et qui peut d'ailleurs déclencher une crise d'asthme. Avant l'âge de deux ans, la répétition de bronchiolites, à l'occasion de rhinopharyngites, permet de parler d"`asthme du nourrisson", ce qui ne veut pas dire que l'enfant deviendra asthmatique plus tard.
Chez le nourrisson, reconnaître l'asthme n'est pas facile. On est aidé s'il y a des personnes allergiques dans la famille, si l'enfant a eu un eczéma ou des laryngites. C'est en général la nette amélioration par le salbutamol qui sera le bon test confirmant le diagnostic. L'échec du traitement est en faveur d'une bronchiolite ou de l'inhalation d'un corps étranger à laquelle il faut penser.
II. Apprécier la gravité de la crise
La question à se poser tout de suite est : "l'enfant est-il en détresse respiratoire imposant un transfert à l'hôpital ?"
Cliniquement, trois signes de gravité peuvent exister :
- signes de lutte (tirage), indiquant que l'enfant met en jeu tous ses muscles pour respirer (creusement dans le cou, entre les côtes, sous le sternum) et, chez le bébé, battement des ailes du nez ;
- signes de manque d'oxygène : rythme respiratoire rapide (polypnée), cyanose des lèvres, de la langue et des doigts ;
- signes d'excès de gaz carbonique : sueurs, troubles de la conscience.
Chez le grand enfant, chez qui la crise peut être sous-estimée ou s'aggraver brusquement, on peut apprécier l'importance de la gêne respiratoire grâce à un petit appareil : le débitmètre de pointe (ou peak flow), qui mesure le souffle du malade, c'est-à-dire le degré d'obstruction des bronches. Il existe plusieurs appareils, peu coûteux.
Il existe une échelle indiquant les normes de l'enfant en fonction de sa taille. Par exemple, un enfant de 10 ans a un débit d'environ 2501/mn ± 50. C'est ce chiffre qu'indiquera le peak-flow. Cet appareil permet aussi d'apprécier l'amélioration apportée par le traitement.
Un exemple de débit-mètre
III. Traitement
Le traitement de la crise d'asthme de l'enfant repose essentiellement sur les bronchodilatateurs et les corticoïdes par voie orale. La théophylline n'est plus guère utilisée dans les crises d'asthme de l'enfant.
Crise | Symptômes |
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Légère |
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Modérée |
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Sévère |
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Grave |
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1. Chez l'enfant de plus de 2-3 ans
Il est urgent, dans tous les cas, de faire inhaler un bronchodilatateur en première intention (ß2 stimulant d'action rapide). Le plus usuel est le salbutamol en spray pour aérosol. Cette simple cartouche, qui demande une coordination entre le déclenchement de l'aérosol par la main et l'inspiration profonde, peut être utilisée à partir de 10-12 ans comme chez l'adulte.
Avant cet âge, il est nécessaire d'utiliser une "chambre d'inhalation". La plus simple est l'Aerochamber (laboratoire GSK), mais ce dispositif n'est utilisable qu'à partir de 6 ans (6-12 ans) ; l'appareil le plus utile est le Babyhaler (GSK également), qui convient de 0 à 6 ans.
Si on ne dispose d'aucun appareil, on peut fabriquer une chambre "de fortune" avec deux bouteilles (convient pour l'enfant de 2 à 12 ans) :
- il faut utiliser deux bouteilles en plastique dont on coupe le tiers inférieur pour les emboîter l'une dans l'autre ; la jonction est rendue hermétique par du sparadrap ;
- l'enfant prend une extrémité dans sa bouche et on place l'aérosol à l'autre extrémité.
En dehors de l'aérosol, il existe d'autres présentations de salbutamol, ou de terbutaline. Ces produits ne nécessitent pas de déclenchement manuel car l'appareil prépare la dose à inspirer (cf tableau 2).
Dans la crise simple
On fait inhaler deux bouffées de Ventoline® (une seule pour les spécialités comme Ventilastin® ou Bricanyl Turbuhaler® (cf Tableau 2). On renouvelle les bouffées 5 à 10 minutes plus tard et, souvent encore, une troisième fois. Si la cessation de la crise n'est pas parfaite, on peut renouveler 6 fois, sans dépasser 15 bouffées.
- Si ce traitement est efficace, on poursuit la bronchodilatation seule toutes les 4 à 6 heures pendant une journée, puis 3 fois par jour pendant 3 à 4 jours.
- S'il est inefficace ou si la crise était d'emblée grave, on recourt aux corticoïdes par voie orale, 1 mg/kg en une prise pour le Solupred® ou le Cortancy®l par exemple, puis la même dose pendant 3 - 4 jours (cf tableau 3).
- Si l'enfant va très mal, on peut faire une injection sous-cutanée de Ventoline® ou de Bricanyl®avant de le transférer en milieu hospitalier où l'on utilisera les mêmes produits : nébulisations de bronchodilatateurs avec oxygène, corticoïdes en perfusion...
La crise liée à l'effort est souvent rapidement guérie par une ou deux inhalations de bronchodilatateurs.
2. Chez le nourrisson
On utilise également les bronchodilatateurs. La chambre d'inhalation est indispensable (Babyhaler) ou peut être remplacée par une nébulisation au masque si on dispose de l'appareil.
Les corticoïdes par voie orale sont donnés assez vite à cet âge.
Le transport à l'hôpital pour surveillance et oxygénothérapie ne doit pas être retardé, surtout chez les très jeunes nourrissons. Un désencombrement bronchique par un kinésithérapeute habitué aux enfants de cet âge peut être très utile.
Une fois la crise jugulée, il convient de faire un bilan et de donner tous les conseils de prévention afin de réduire la fréquence des crises.
Tableau 2 : bronchodilatateurs - 2 stimulants d'action rapide
Salbutamol | Nom | Posologies | Prix |
Ces produits ne nécessitent pas de chambre d'inhalation Toujours bien lire les notices | Airomir autohaler® Asmasal Clickhaler® Buventol Easyhaler® Ventilastin Novohaler® | 1 à 2 bouffées/prise 1 à 2 bouffées/prise 1 à 2 bouffées/prise 1 dose par prise | 12 €/200 doses 13 €/200 doses 12 €/200 doses 10 € appareil - 200 doses |
Ventoline®
|
2 bouffées par prise 0,05 à 0,15 ml/kg | 5€/200 doses, pas d'appareil 20 €/60 doses à 2,5 mg/2,5 ml | |
Terbutaline | Bricanyl Turbuhaler® | 1 bouffée/prise | 15 € appareil - 200 doses |
Bricanyl® pour nébulisations | 0,1 à 0,2 ml/kg/nébulis° | 24 €/50 minidoses 5 mg/2 ml | |
Bricanyl® injectable | < 2 ans : 0,1-0,2 ml/lOkg | 3€/8 ampoules à 0,5 mg |
Corticoïdes
Les corticoïdes inhalés n'ont pas leur place dans l'urgence.
Tableau 3 : les corticoïdes
Voie orale | Nom | Présentation | Posologie | |
Betaméthasone | CELESTENE® | Gouttes Comprimés à 0,5 mg | 10 gttes/kg en une prise 0,075 à 0,3 mg/kg en une prise (équivalent à 1 à 2 mg/kg de prednisone) | |
Betaméthasone | SOLUPRED® | Soluté buvable Comprimés à 5 ou 20 mg orodispersibles ou effervescents | 1 à 2 ml/kg en 1 prise 1 à 2 mg/kg en 1 prise | |
Prednisolone | HYDROCORTANCYL® | Comprimés à 5 mg réservés à l'enfant > 5 ans | 1 à 2 mk/kg en 1 prise | |
Prednisone | CORTANCYL® | Comprimés à 1, 5, 20 mg | 1 mg/kg en 1 prise | |
Dexaméthasone | DECTANCYL® | Comprimés à 0,5 mg | 0,075 à 0,3 mg/kg en 1 prise | |
Méthylprednisolone | MEDROU | Comprimés. à 4, 16 ou 32 mg | 0,4 à 1,6 mg/kg en 1 prise | |
Voie injectable | ||||
Betaméthasone | CELESTENE® | Ampoules 4 ou 8 mg Voie IM ou IV selon les besoins | 4 à 16 mg/j selon l'état du patient | |
Méthylprednisolone | SOLUMEDRO®L | Lyophilisat 20, 40, 120 mg/2ml IM profonde ou IV | 1 à 3 mg/kg/j | |
Betaméthasone | BETNESOL® | 4mg, IM ou IV | 0,1 à 0,3 mg/kg/j |
A signaler : la théophylline n'est plus guère utilisée dans les crises d'asthme de l'enfant.
Développement et Santé, n°191/192, 2008