Ankylostomose chez l'enfant

Par Patrice Bourée Consultation des Maladies Parasitaires, Institut Alfred Fournier, Paris

Publié le

Le parasitisme intestinal peut apparaître très tôt, dès l’âge de 3 semaines, et augmente avec l’âge. Il est lié à une hygiène alimentaire défectueuse et au contact avec le sol, favorisé par la marche en terrain le plus souvent humide. Le polyparasitisme fréquent, associé au paludisme et à une malnutrition, aggrave les symptômes.

Epidémiologie

Il existe deux espèces d’ankylostomes : Ankylostoma duodenale en zone subtropicale et Necator americanus en région tropicale.

Necator Ankylostoma

Les vers adultes, mesurant environ 1 cm de long, sont situés dans le duodénum et s’accrochent sur la muqueuse duodénale par leur crochets buccaux. Ils pondent des oeufs qui sont éliminés avec les selles. Dans la nature, les oeufs éclosent et les jeunes larves rhabditoïdes se transforment en larves strongyloïdes infestantes, qui traversent la peau des enfants qui marchent ou jouent en terrain boueux.

Après un circuit complexe dans l’organisme, les parasites deviennent adultes dans le duodénum en 40 jours. Ces nématodes sont hématophages. Une infestation massive et chronique, fréquente en pays tropical, entraîne donc une anémie par carence martiale.

Clinique

Les phases cutanée (ou "gourme des mineurs") et aérienne ("catarrhe des gourmes") sont très rares chez l’enfant. Les troubles digestifs sont fréquents mais non spécifiques : douleurs abdominales, diarrhées, nausées, vomissements. Une malnutrition est fréquemment associée.

Non traitée, l’ankylostomose aboutit à un syndrome anémique : pâleur cireuse, asthénie, œdème du visage et des membres. L’examen clinique constate une tachycardie, une hypotension, un souffle systolique, puis une hépatomégalie douloureuse avec reflux hépato-jugulaire. Une radiographie du thorax montre une cardiomégalie.

Diagnostic

L’hémogramme révèle une hyperéosinophilie, non spécifique, en zone tropicale, mais surtout une anémie ferriprive, microcytaire, hyposidérémique et non régénérative. Cette anémie s’étant installée très progressivement est souvent bien supportée, malgré des chiffres relativement bas d’hémoglobine, d’autant plus qu’il peut y avoir une association avec une drépanocytose ou un déficit en G6PD. Cependant, des hémorragies intestinales massives ont déjà été rapportées à l’ankylostomose.

L’ankylostomose est affirmée par la mise en évidence des œufs à l’examen parasitologique des selles (œufs ovoïdes, clairs, de 70 x 50 µ contenant 4 ou 8 blastomères). Une numération des œufs permet de rattacher l’anémie à l’ankylostomose, s’il y a plus de 10 000 œufs/g de selles. Mais il faut savoir qu’en cas de malnutrition, la fécondité des vers diminue et le nombre d’œufs sera artificiellement diminué. Le sérodiagnostic n’a pas d’indication ici.

Traitement

Le traitement est basé sur le pyrantel et les dérivés imidazolés (tableau).Habituellement, le seul traitement antiparasitaire suffit à faire disparaître l’anémie en un mois. Le traitement régulier par albendazole permet de réduire l’incidence des diarrhées des enfants et d’améliorer leur croissance. L’OMS a proposé de traiter les enfants par une association de dérivés imidazolés et de praziquantel. Si l’anémie est très importante et risque de mettre en jeu la vie de l’enfant, une transfusion (culot globulaire) s’impose, avec un traitement martial pendant deux mois.

Traitement de l'ankylostomose

Nom chimique Présentation Posologie
Pamoate de pyrantel cp à 125 mg susp.à 3 % 2 cp/10 kg/3 j
Flubendazole cp à 100 mg susp. à 25 mg/ml 2 cp/j/3 j ou 2 cuillères mesure/j/3 j
Mébendazole cp à 100 mg susp. à 20 mg/ml 2 cp/j/3 j ou 2 cuillères mesure/j/3 j
Albendazole cp à 400 mg susp. à 4 % 1 cp ou 10 ml de susp./1 j
En outre : sels ferreux, vitamines, voire transfusions (exceptionnelles)

La prophylaxie est difficile : lutte contre le péril fécal et interdiction de la marche pieds nus en terrain boueux. Ainsi, à titre d’exemple, une campagne d’information avec construction de latrines a permis de faire régresser considérablement la morbidité de l’ankylostomose à la Réunion.