Amoebose chez l'enfant

Par Patrice Bourée Consultation des Maladies Parasitaires, Institut Alfred Fournier, Paris

Publié le

I. Epidémiologie

L’amoebose est fréquente en milieu tropical, l’infestation s’effectuant par ingestion de kystes d’Entamoeba histolytica avec l’eau ou les crudités, ou directement par les mains sales, en particulier chez les très jeunes enfants. Mais il semble qu’il y ait un certain mécanisme de défense, car une étude sur un grand nombre de mères infestées par Entamoeba histolytica n’a montré qu’une faible contamination de leurs jeunes enfants. Après ingestion, les kystes se transforment en formes végétatives (forme minuta) qui se multiplient avant de s’enkyster pour être éliminés avec les selles (cycle non pathogène). En cas de moindre résistance de l’état général, les formes végétatives augmentent de volume et agressent la muqueuse en se nourrissant d’hématies (formes hématophages). Elles créent des foyers de nécrose dans la muqueuse colique, responsables de l’amibiase colique (abcès "en bouton de chemise").


Abcès en "bouton de chemise"

Le passage de ces formes hématophages est possible vers le foie ou les poumons et est responsable d’abcès du foie ou du poumon (rare chez l’enfant).

II. Clinique

Les troubles sont essentiellement digestifs. Chez le nourrisson, l’amoebose intestinale se présente sous forme de diarrhée d’intensité très variable, allant d’une diarrhée banale fébrile à la dysenterie avec pus, glaires et sang, entraînant une déshydratation. Une malnutrition est souvent associée. En cas de retard au diagnostic, peut s’installer une diarrhée chronique.

Le grand enfant se plaint surtout de diarrhée aiguë afébrile ou de syndrome dysentérique avec selles afécales, glaires et sang. Parfois, l’enfant présente des rectorragies sans diarrhées. Au Népal, la prévalence d’Entamoeba histolytica est de 27% chez les enfants diarrhéïques.

Les complications sont la déshydratation, la perforation intestinale avec péritonite parfois mortelle, l’abcès amibien du foie (hépatomégalie douloureuse, fébrile), et, plus rarement, abcès pulmonaire (toux, douleur thoracique) ou des abcès cutanés péri-anaux. L’abcès amibien du foie est très rare chez le nourrisson.

III. Diagnostic

Le diagnostic est affirmé par la découverte des amibes (formes hématophages) dans l’examen parasitologique des selles, ou dans l’examen des glaires rectales. La mise en évidence d’amibes de l’espèce Entamoeba dispar non pathogène, nécessite des techniques particulières pour la différencier de Entamoeba histolytica. La rectoscopie montre des ulcérations linéaires, en « coup d’ongle » et permet le prélèvement direct des glaires.

L’hémogramme n’est pas modifié dans l’amoebose intestinale. Une hyperleucocytose est retrouvée en cas de localisation hépatique et la vitesse de sédimentation est alors élevée. Dans ce cas, le sérodiagnostic est positif.

IV. Traitement

Le traitement est basé sur les imidazolés (amoebicides mixtes), et sur les amoebicides de contact (tableau). Il faut, en outre, traiter la déshydratation et les infections associées (salmonellose, shigellose). En cas d’intolérance alimentaire, on a recours aux perfusions intra-veineuses de métronidazole, à la dose de 30 à 40 mg/kg/j pendant trois à cinq jours.

D’autres espèces d’amibes, comme Dientamoeba fragilis, peuvent provoquer divers troubles digestifs chez l’enfant et doivent être traitées par des antiamibiens mixtes. Les autres amibes Entamoeba coli, Endolimax nanus ne sont pas pathogènes.

Traitement de l'amibiase
Nom chimique Posologie Présentation
Tinidazole 50 à 70 mk / kg / j / 3j Cp à 500 mg
Métronidazole 30-40 mg / kg / j / 7 j Idem en perfusion IV / 3 à 5 j Cp à 250 et à 500 mg Susp. à 4 % Flacon de 100 ml à 0,5 %
Ornidazole 30 mg / kg / 3 j Cp à 500 mg